Les « projets » menés par les agents ZEP ont-ils réellement transformé le rapport à l’école des enfants et des familles de milieux populaires ?
Ces « projets » (mot souvent utilisé par ces agents ZEP) ont-ils réellement amélioré les acquisitions dans les apprentissages de base ?
Entendu chez plusieurs enseignants pendant la période ZEP
« Pour tous ces projets amenés de l’extérieur, certains sont intéressants mais dépossèdent les enseignants de leur travail. Il n’y a pas ou peu de vraies rencontres de travail entre agents ZEP et enseignants. Quand elles se font, c’est sur le temps de midi, notre temps pour souffler et un temps trop court pour du vrai travail. »
« Parfois, les extérieurs viennent faire leur « animation » pour tel ou tel projet et comptent sur les enseignants quasi uniquement pour régler la discipline ! »
« D’autres travaux sont spectaculaires, photographiés, écrits, touchant à beaucoup de choses. Mais où est le souci du temps nécessaire pour les apprentissages de base qui demandent aussi systématisation et que les enseignants ont à travailler au quotidien ? Un peu comme si les extérieurs pouvaient déployer leurs projets et que l’instit n’avait qu’à s’occuper de tout le reste (moins spectaculaire, voire nié, quand pas dénigré). »
« De l’argent, il en faut pour des locaux des agents ZEP, pour leurs beaux dépliants,pour leur matériel d’animation… alors que l’élémentaire manque dans les écoles (combien de fois les enseignants y vont de leur poche) tant en matériel qu’en nécessaire formation continuée des enseignants. »
« C’est très bien les « réseaux » (ce sont les mots préférés des agents ZEP : animations, projets, réseaux et partenariat !) de ceci, de cela, alors que les enseignants et les directions ont toutes les peines du monde à construire leur travail en équipe dans leur propre école ! Qui veut des réseaux, du partenariat… mais surtout, pour quoi faire réellement ? »
« Qui a-t-on appelé pour l’évaluation des ZEP ? Très peu d’enseignants en tout cas. »
« Finalement, tous les travailleurs socioculturels des associations et autres, que gagnent-ils à venir s’occuper de l’école en milieu populaire ? Et qu’y gagnent réellement les enfants ? Et les enseignants ? »
« Médiateurs, ils peuvent être géniaux… mais aussi les pires quand certains deviennent des sortes de flics pour les familles (investigations pour les absences par exemple) et des « descendeurs » d’enseignants pour les enfants. »
Et depuis la période D+
« Enfin nous allons pouvoir concevoir des projets qui correspondent à nos observations et à nos besoins sans devoir nous aligner sur les idées des agents D+. »
« Quelle est encore la raison d’être d’agents extérieurs à l’école à part organiser des réunions avec les directions ? »
« Pourquoi regrettent-ils tellement l’époque ZEP ? »
« Et que savent-ils réellement de la tâche et des inventions quotidiennes des enseignants qu’ils dénigrent souvent un peu vite ? »
Ces propos abrupts disent sans doute quelque chose à la fois d’une amertume de ne pas se sentir réellement partie prenante et à la fois quelque chose d’un souci : les apprentissages de base.
Elles disent aussi quelque chose d’un malentendu, d’une incompréhension, d’un fossé( ?) entre les travailleurs « socioculturels » et les travailleurs de l’enseignement.
Par manque d’information ? Par absence de vraie concertation ? Par absence d’analyse ?
Elles disent en tout cas quelque chose d’une dépossession, d’une perte d’identité et de reconnaissance.