La question interculturelle avait fini par faire problème. De la nécessité de faire reconnaitre les différences, on était passé à une insistance suspecte sur les caractéristiques culturelles des uns et pas des autres. De là à mettre en place des traitements différenciés de certains, traitements dédouanés de toute suspicion de... discrimination, car, trop souvent, on a figé les références aux identités, en les limitant à des représentations fantasmées et limitées de ce qui fait culture.
Il a donc fallu déconstruire cette conception de l’identité culturelle, l’enrichir de son ancrage dans les trajectoires individuelles et collectives, sociales, économiques et politiques.
Pour ce qui est de l’école, en grattant les caractéristiques culturelles sur lesquelles reposeraient les inégalités, nous sont apparues — ô surprise — les origines socioéconomiques qu’on nous disait dépassées. Les différences culturelles, cache-sexe des inégalités sociales ?
Mais à force de nous acharner à contrer l’approche culturaliste, et à réhabiliter les analyses en termes de classes sociales, n’avions-nous pas sous-estimé l’importance des références culturelles pour créer de la fierté, de l’émancipation face à des rapports de domination aussi portés par des stigmatisations de caractéristiques culturelles ?
Il nous fallait donc revenir à la question interculturelle, examiner comment l’insérer pleinement dans notre analyse de l’école. Et bon sang, ce fut bien utile !
De pratiques de classe en reculs réflexifs, ce dossier tente d’éclairer autrement ce qui fait différence et ce qui peut ou pas faire place à chacun dans la classe et dans les apprentissages. Langues, origines, religions, il s’agit à la fois de reconnaitre, de faire place à et de faire apprentissage commun, de mieux comprendre ce qui, dans la culture commune de la classe et de l’école, fait obstacle ou facilite les apprentissages, fait place ou rejette, dans la complexité des identités et des histoires personnelles.
Comité de rédaction