Entendu en salle des profs : « J’aimerais bien qu’on arrête de dire qu’on est une école à pédagogie active. Ça ne veut rien dire et à cause de ça, les enfants pensent qu’on n’a pas le droit de leur donner des devoirs. » « De toute façon, toutes les pédagogies sont actives. L’enseignement explicite aussi ! » « Ah ? » « Ben oui, quand tu expliques vraiment bien quelque chose, tu permets à l’élève d’être acteur de son apprentissage, donc il est plus actif ! »
Les débats sur les pédagogies actives, c’est comme celles sur les vaccins ou sur le charme comparé du nonante et du quatre-vingt-dix, si je peux comparer… Ça me donne parfois envie de mettre la tête sous l’oreiller.
À qui et à quoi se réfère-t-on quand on parle de pédagogie active ? En vrac, à Montessori, à Freinet, à Oury, à Decroly, à Steiner, à la pédagogie du projet, aux situations problèmes ou à la tâche complexe, ou encore au socioconstructivisme...
Qu’est-ce qui se cache derrière ces étiquettes qui, parfois, servent à vendre ? Chacune de ces méthodes et de ces techniques a une histoire. Elles s’inscrivent souvent dans la réponse à des besoins rencontrés sur le terrain, rappelons ici que Maria Montessori et Ovide Decroly étaient avant tout des médecins. Les concepteurs de ces méthodes se positionnent également face à des valeurs. Pour Célestin Freinet qui sortait de la Première Guerre mondiale, insister sur la classe coopérative n’était pas neutre. Fernand Oury, instituteur en banlieue parisienne, se déclarait inadapté à l’école-caserne, qu’il perçoit comme une mise en œuvre des dressages indispensables pour conditionner l’élève aux apprentissages conçus comme acquisition d’automatismes. Tandis que les uns insistent sur l’épanouissement personnel de l’enfant, d’autres appuient sur la coopération et l’émancipation.
Alors, comment dans ce dédale, reconnaitre un projet éducatif construit par des enseignants (trans)formés à/par des dispositifs d’apprentissage et soucieux d’émancipation ? Ce n’est pas écrit sur leur front !
On n’a pas fait le tour des nouvelles écoles labellisées. On s’est surtout demandé ce que ça peut donner en pratique, en classe. Et comment faire pour qu’en faisant, tous apprennent, et pas seulement ceux qui, de connivence avec le prof par leur milieu socioéconomique, ont décelé l’apprentissage caché derrière l’action.