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En France, l’Éducation nationale lors des
précédents gouvernements de droite alors au
pouvoir semblait avoir tourné le dos aux valeurs
républicaines qui fondent notre pays et certains
enseignants ne se reconnaissaient plus dans
l’école telle qu’elle était devenue. Une logique
gestionnaire avait pris le dessus.

Les restrictions budgétaires et les suppressions
de postes et de classes avaient touché en effet
de manière insidieuse les élèves les plus fragiles
sans que les syndicats enseignants et
les associations de parents d’élèves aient pu
y remédier. Le service public s’en était trouvé profondément
affecté ainsi que les conditions de travail des
enseignants : classes surchargées, mise en compétition,
montée des individualismes et des violences scolaires et
institutionnelles caractérisent ces années difficiles.

ENTRE CAUCHEMARS

Au vu des dégâts occasionnés, réparation et refondation
de l’école ont été mises à l’ordre du jour. Le
nouveau gouvernement socialiste, arrivé au pouvoir
en 2012, a fait de l’école une priorité et le ministère de
l’Éducation nationale s’est vu confier la mission de reconstruire
sur les ruines d’une institution dévastée par
les choix politiques précédents : recréer 60 000 postes,
remettre en place la formation initiale et continue des
enseignants, redonner confiance en l’école aux élèves
décrocheurs, aux élèves en situation de handicap et
à besoin spécifique en visant une école inclusive, (re)
mettre en place la pédagogie différenciée, le travail en
équipe, l’évaluation par compétences, promouvoir une
école plus juste, ce qui nécessite une réforme à la fois
structurelle et organisationnelle. Des relations moins
verticales où le poids historique de la hiérarchie devrait
s’alléger sont également à inventer.
La loi de Refondation de l’école votée le 8 juillet 2013
a suscité chez certains enseignants et certains syndicats
corporatistes, réticences et résistances. La réforme des
rythmes scolaires a donné lieu à des stratégies politiciennes
éloignées de l’intérêt et de la réussite des élèves.
Un des principaux arguments avancés du côté de certaines
familles et des enseignants a été le surcroit de
fatigue pour les élèves alors que les chronobiologistes
ont démontré que les apprentissages étaient mal répartis
dans la semaine et n’étaient pas adaptés aux rythmes
de l’enfant. Les représentants des municipalités ont
évoqué quant à eux une surcharge financière trop importante
et une inégalité entre les territoires et les communes
alors que des fonds de l’État ont été débloqués
à cet effet. Cette réforme est devenue un enjeu dans
certaines communes lors des élections municipales. De
nombreux maires socialistes n’ont pas été réélus et ont dû céder leur place. Amenée sous forme de décret, elle a
d’ailleurs couté à Vincent Peillon, sa place de ministre
de l’Éducation Nationale, après le 30 mars 2014, lors du
remaniement ministériel.
Le retour à la semaine de quatre jours et demi et la
mise en place des TAP (temps d’activité périscolaire)
après 15h30 sont pourtant nécessaires pour de meilleurs
apprentissages. Ils ont d’ailleurs été portés par la fédération
majoritaire des parents d’élèves : la FCPE [1]. Celle-ci
demande que se mette en place une école davantage
bienveillante, attentive à chaque élève, une école ouverte
qui soit le lieu d’une éducation partagée. Les nouveaux
rythmes scolaires auraient dû être à ce titre l’opportunité
pour l’ensemble des acteurs de la communauté éducative
- représentants des municipalités, des mouvements
d’éducation populaire, des associations, enseignants
et parents - d’amorcer un dialogue et de construire ensemble
de manière pragmatique un véritable projet éducatif
à destination de tous les élèves. Elle a donné lieu à
des polémiques souvent stériles, très éloignées des enfants
et de leur intérêt.

ET RÉALITÉ…

La loi de la Refondation de l’école votée le 8 juillet 2013
doit s’appliquer malgré les hostilités qu’elle suscite et malgré
le résultat aux municipales du Parti socialiste. Elle ne
se réduit pas d’ailleurs à la réforme des rythmes scolaires.
Elle va dans le sens du progrès en s’affirmant inclusive et
en promouvant la coéducation. Elle est porteuse d’espoir
pour beaucoup et notamment pour la principale fédération
de parents d’élèves qui attend d’elle la possibilité
d’une plus grande implication dans l’école et des effets
sur le bien vivre ensemble et sur la réussite des enfants.
Comment la mettre en oeuvre ? Que faire pour qu’elle devienne
réalité ?
Une épée de Damoclès est au-dessus de la tête de tous
les ministres réformateurs et progressistes de l’Éducation nationale en France. Ils ont une courte durée de vie.
Malgré le soutien de la FCPE, Vincent Peillon a été remercié.
Il avait réussi à faire voter cette loi de Refondation
après une concertation à l’Assemblée nationale et au Sénat
là où un précédent ministre socialiste avait échoué. Le
nouveau ministre Benoît Hamon semble déterminé à la
mettre en oeuvre et à prolonger le travail de son prédécesseur.

« La loi de
Refondation
doit s’appliquer
malgré les
hostilités. »

Telle était en effet la teneur de son discours prononcé
pour l’inauguration de l’ESPE- École Supérieure du
Professorat et de L’Éducation- de Lorraine le 17 avril 2014.
Il a toutefois accordé un assouplissement
dans la mise en place
des activités périscolaires pour les
communes rurales mais il ne revient
pas sur la semaine de quatre
jours et demi. La Refondation doit
se mettre en place et elle doit se
faire avec tous les partenaires de
l’école et notamment avec les parents
qui sont souvent les grands
oubliés de l’Institution. Une vérification démocratique
qui généralement fait défaut en France devrait pouvoir
exister. Notre pays promulgue de nombreuses lois qui ne
sont pas appliquées…par l’État lui-même. En témoigne
par exemple la loi du 11 février 2005 « pour l’égalité des
droits et des chances, la participation et la citoyenneté des
personnes handicapées » qui n’est que partiellement respectée
au sein même de l’Éducation nationale.
L’introduction de l’éducation à la morale dans une
optique citoyenne et dans un esprit de laïcité, le développement
des pratiques artistiques comme facteur
d’inclusion, d’émancipation et de solidarités nouvelles
sont très attendus ainsi que de nouveaux programmes
et une autre gouvernance des établissements fondée sur
un leadership pluriel. Ils seront peut-être les ferments
d’un changement de l’école et de la société sans rupture
brutale.

notes:

[1FCPE : la Fédération
des Conseils
de parents d’élèves
de l’École Publique
a été créée ,
sous l’influence
d’Henri Aigueperse,
secrétaire
général du Syndicat
national des
instituteurs et
d’Albert Bayet
président de
la Ligue française
de l’enseignement ;
officiellement du
23 avril 1947 puis
a été reconnue
d’utilité publique
en 1951 et mouvement
d’éducation
populaire en
1982. Elle compte
aujourd’hui
315000 adhérents.