Hommage à Martine

Le trois septembre dernier, nous a quittés une personne présente dans CGé depuis une quinzaine d’années, Martine CHEVALIER.

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Martine s’est battue contre la maladie pendant plusieurs mois, soutenue au jour le jour par ses proches et ses amis.

À CGé, nous avons surtout connu Martine dans les activités concernant la Pédagogie Institutionnelle et lors des réunions mensuelles du conseil d’administration où elle a représenté l’équipe de Pédagogie Institutionnelle pendant deux mandats (elle était prête à en entamer un troisième).

Ce départ trop précoce nous touche et laisse un vide dans notre mouvement. Nous ne pouvons que faire mémoire de sa présence avec ses mots et les nôtres. Ceux d’un petit texte qu’elle a écrit lors d’un stage de Pédagogie Institutionnelle et ceux que nous avons dit lors de ses funérailles.

Maitrise… Inquiétude

« Lorsque j’ai la sensation de maitriser assez d’éléments, dans la classe, dans ma vie, dans cette formation, je suis plus à l’aise. Alors, la part d’insécurité inhérente à toute situation nouvelle n’est pas importante. Il y a clairement ce qui est prévu et ce qui reste imprévu.

Quelle inquiétude parfois lorsque je dois lancer une nouvelle activité dont je ne maitrise pas tout, quels souvenirs difficiles de certains moments passés à la Marlagne, il y a trois ans, pour la première année en PI.

Et pourtant, comme formatrice d’enseignants, il est pour moi fondamental de mettre et d’être mis en situation concrète d’apprentissage, de laisser la part essentielle à l’apprenant dans la construction des notions nouvelles. Et donc d’être dans de l’incertain.

Je vis le plus souvent dans cette contradiction, cette ambivalence, tantôt insupportable, tantôt supportable.

Quelle est donc ma place comme prof, ou comme membre d’un groupe ? Lorsque je ne sais pas exactement où on va, lorsque les rôles ne sont pas bien connus, définis, lorsque, sans doute, la confiance en moi et dans les autres n’est pas claire, une tension intérieure nait en moi et l’inquiétude surgit.

D’où me vient cette « nécessité » de bien savoir, de bien contrôler (dans le sens de connaitre à fond) ? Sans doute de bien loin, d’une incertitude face à mon avenir, d’une demande implicite d’être reconnue, encouragée, de la peur des sanctions…

Et pourtant des choses changent. Dans ma vie, dans mes classes, dans cette 3e année de stage PI, je pose un regard neuf. La mise en place de structures claires, progressivement habitées par les étudiants, m’aide à leur laisser une autre place. Et je participe à cette semaine-ci de formation, avec une aisance nouvelle. Même si des inquiétudes subsistent, même si le souci de « faire presque à la perfection » reste présent, ces sentiments sont dynamisants et non plus angoissants ou paralysants. Je possède des outils permettant de me décentrer, de laisser une place aux autres apprenants (en classe ou ici) et peut-être de mieux progresser personnellement ou d’aider d’autres à avancer.
»

Martine CHEVALIER, Stage PI, 3e année – passage à la responsabilité, RPé 1999.

Constance, engagement

« Pour Martine, notre mouvement sociopédagogique CGé, ChanGement pour l’Égalité, était un lieu important d’apprentissages, de rencontres, de liens tissés, d’engagements. Ces quelques mots-ci sont portés par tous ceux de CGé qui ont partagé un peu ou beaucoup de moments avec elle, qui sont ici ou qui ne peuvent pas être ici ce matin.
Depuis le début des années ‘90, Martine a été avec nous et, au fil des années, de plus en plus active principalement dans les moments de formation et d’organisation pour la Pédagogie Institutionnelle.

Dans les mails échangés ces jours-ci, plusieurs de ceux qui ont fait avec elle des stages de Pédagogie Institutionnelle au cours de la douzaine d’années où elle y a été responsable, parlent de sa force, de son investissement humain et professionnel à 200 %.

Un mot qui m’est souvent venu à l’esprit à son sujet, c’est le mot « constance ». Nous pouvions compter sur elle. Dans le conseil d’administration de CGé également. Elle a fait le trajet Liège-Bruxelles et retour dans beaucoup de soirs et de weekends. Elle nous a reçus dans son école souvent.

Nous gardons en tête ces images-là des diverses formes de présence de Martine et d’autres encore comme ce banc à la Marlagne où pouvait aller s’assoir à côté d’elle ceux du stage de Pédagogie Institutionnelle qui avaient une « humeur » à dire et pressentaient qu’ils trouveraient chez elle une écoute rassurante. Ou encore ces moments de sport et de danse qui avaient l’air de lui faire tellement plaisir.

Nous gardons spécialement en tête un dernier échange avec l’une de nous qui lui avait donné un petit cahier à sa demande. Petit cahier où elle voulait noter quelque chose des visites qu’elle recevait. Jeudi dernier, quand Anne lui a demandé ce qu’elle voulait écrire sur une page blanche, Martine a dit : « Tous capables ». Venant d’elle qui n’avait souvent pas tout à fait confiance en elle, c’est un beau cadeau à garder.
»

Noëlle DE SMET, Lu à Robermont lors des funérailles de Martine