C’est un vieux débat lié à l’école. Faut-il évaluer sur 10 ou sur 20 ? Quelle valeur accorder à ces notes chiffrées ? Les remplacer par des lettres ? Gare : sans les notes, plus d’efforts, pas de motivation, « baisse de niveau » assurée… La cata, quoi !
Le débat refait surface régulièrement. Cette fois, c’est une association d’étudiants français (AFEV) qui propose depuis 1991 du soutien scolaire dans les cités dites « sensibles ». Elle argumente sur base de l’expérience quotidienne de ses bénévoles. Extraits choisis :
« Alors que la confiance en soi est indispensable à la réussite scolaire, les conséquences de cette culture de la note sur les élèves en difficulté sont désastreuses : fissuration de l’estime de soi, absence de valorisation de leurs compétences, détérioration des relations familiales et, à terme, souffrance scolaire ».
« L’école gagnerait à s’appuyer sur une autre logique que celle de la compétition. Il faut qu’elle devienne pour tous les enfants une étape positive de leur construction, de leur épanouissement, du développement de l’estime de soi et de l’élaboration d’un rapport sain aux apprentissages ».
Conclusion : « Nous appelons à supprimer la notation à l’école primaire qui doit devenir l’école de la coopération et non de la compétition ».
De quoi réfléchir et débattre.
Ce qui est nouveau et interpellant, c’est que l’appel est largement relayé et soutenu par des personnalités de très haut niveau qui ne s’engagent pas à la légère. On trouve parmi les premiers signataires issus de disciplines et secteurs très divers des pointures comme Boris Cyrulnik (neuropsychiatre), Axel Kahn (généticien), François Dubet (sociologue), Eric Maurin (économiste), Marcel Rufo (pédopsychiatre), Michel Rocard, Daniel Pennac… Hommes et femmes de droite (mais oui), du centre et de gauche. Cela aussi c’est nouveau.
En outre, l’appel a eu droit à deux pleines pages dans Le Nouvel Observateur (18-24 novembre). D’où les nombreux échos sur la Toile et dans d’autres médias. Quand la presse s’intéresse à des questions de fond, on s’en réjouit.
Savez-vous que chez nous, comme en France, il n’est pas obligatoire de « noter/coter ». Qu’il y a, en Communauté française, quelques écoles et des dizaines d’instits qui ont volontairement renoncé à ce type d’évaluation. Que des parents les ont soutenus et que les enfants s’en portent et sortent très bien… Il est vrai que cela se passe le plus souvent dans des écoles à projet « alternatif » et avec des publics culturellement favorisés. Mais pas seulement.
Mais attention : supprimer la notation n’a de sens que dans le cadre d’un projet plus large qui touche à tous les aspects de la vie scolaire : apprentissages, vivre ensemble, relations entre adultes, avec les parents, avec l’environnement…
Un projet qui va à contre-courant des vents dominants : ce monde du classement permanent qui nous permet de savoir à tout moment ce qu’il faut voir, lire, écouter, admirer, détester. « Le best of nous guide, met de l’ordre dans nos idées ou, mieux encore, nous dispense d’en avoir. Et vous voudriez, messieurs les rêveurs, instaurer le désordre dès l’école élémentaire ! » (Robert Solé).
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