Pisa 2009 (les résultats comparés des élèves de 15 ans des pays de l’OCDE) a suscité beaucoup de commentaires. En positif, je relève l’insistance sur la persistance des profondes inégalités que produit/reproduit notre système scolaire. Comme ceux de nos voisins français et … de nos compatriotes flamands ! Les médias ne peuvent plus ignorer ce scandale. Mais ils ne vont hélas pas jusqu’à en faire l’enseignement majeur de l’enquête.
Aussi je m’interroge sur le consensus mou qui amène à multiplier les « résultats encourageants » dans les titres et réactions du côté francophone. Curieux pour de très faibles avancées en lecture et des reculs en math et en sciences.
Mais je voudrais surtout rappeler le caractère très « OCDE » de ces classements. Il s’agit avant tout de s’inscrire dans une perspective de « performance » et de « rendement ». Pas de questions sur les finalités. Il est bien entendu, pour l’OCDE, que tout le monde inscrit l’enseignement dans un projet libéral, marchand, compétitif, de croissance à tout prix.
Indice intéressant, mais peu relevé et parfois même gommé : l’apparition en tête des classements de Singapour et de Shanghaï. Absents des enquêtes précédentes, voilà que nos « partenaires » ( ?) apparaissent en force et occupent d’emblée les premières places ! Battue la Finlande, c’est ailleurs qu’il faut chercher « la » solution. Du côté de l’Asie du Sud-Est : la Corée, la Chine, Singapour, le Japon, des sociétés « modèles », n’est-il pas ?
Autre rappel : ces classements par points sont très aléatoires. Ce sont des moyennes. Quand on gratte, on découvre des disparités inimaginables à l’intérieur de certains pays. Ainsi, notre « élite » vaut bien celle de la Finlande. Mais quel désastre, chez nous, en queue de peloton. Encore une fois, en matière d’écart, nous sommes de tristes champions du monde.
Dernier bémol, mais il est de taille : Pisa se situe uniquement dans l’ordre du quantitatif. Ces classements se focalisent sur les compétences dans quelques disciplines décrétées « de base » : lecture, sciences et math. Peut-on limiter les objectifs de l’école à ces matières ? A force de ne retenir que ces résultats-là, on en vient à considérer comme secondaires ou à oublier des objectifs plus qualitatifs : développer la créativité, l’esprit critique, les langages du corps, de la main, de la voix…
Normal, si les « idéaux » sont performance et rendement. Et donc la question qui se pose à chacun, c’est : « sur quoi voulons-nous que nos enfants soient jugés ? quels sont nos critères de réussite ? ». En Communauté française, les missions sont claires : développer la confiance en soi de chaque élève et favoriser l’émancipation sociale de tous. Mais qui y croit ?
Alors Pisa ? Un outil parmi d’autres. A examiner avec …esprit critique. Il livre des indications intéressantes (écarts et inégalités inacceptables). Mais son angle d’approche doublé du traitement que lui réservent la plupart des médias risque de mener sur de fausses pistes.