Apprendre à désobéir, petite histoire de l’école qui résiste.

Est-ce suicidaire pour les enseignants d’instruire,
d’éduquer à la désobéissance ? N’y a-t-il pas là un paradoxe
? Est-il possible de faire des élèves des citoyens sans
leur apprendre à désobéir ?

Ce petit livre nous invite à la réflexion, à pousser
plus loin le questionnement. Partir de faits historiques,
remonter le cours de l’histoire et rencontrer des femmes
et des hommes, des ‘résistants’ de la seconde moitié du
XIXe siècle, moment où l’école laïque en France voit le
jour, à aujourd’hui.

Laurence Biberfeld et Grégory Chambat nous
confrontent à l’ambivalence de l’école : lieu de contrôle
et lieu d’émancipation.

Les enseignants, les directions sont-ils des acteurs au
service du public, c’est-à-dire des élèves, ou sont-ils des
agents du service public, de l’État ? État qui laisse s’infiltrer
le libéralisme dans nos écoles et les transforme en un
vaste marché à rentabiliser.

Le mot désobéir fait peur, mais, ne nous y trompons
pas il ne rime nullement avec violence et désordre. Au
contraire, la désobéissance civile est une action qui vise à
se réapproprier le droit d’influer sur les lois et la société.
C’est passer du légal au légitime. C’est entreprendre une
résistance pédagogique et politique. C’est se rappeler
que tous les choix pédagogiques sont politiques : opter
pour certaines méthodes, envisager tel contenu n’est pas
neutre. Reprenons une citation de Freinet proposée par
les deux auteurs : « Nous sommes contre tout bourrage de
crâne, qu’il soit de droite ou de gauche, gouvernemental ou
oppositionnel. Le bourrage de crâne n’est pas l’éducation ; il
en est exactement l’opposé. (…) On ne prépare pas l’homme
à l’activité par la passivité, à la liberté par l’obéissance autocratique,
à la réflexion et à la critique personnelles par le
dogmatisme qui imprègne les livres de nos écoles.
»

Le livre nous rappelle que chaque période a ses
conflits et que combattre l’injustice, les inégalités, l’embrigadement
des jeunes, ça passe par une lutte qui n’est
pas sans risque. Perte de poste, mise à l’écart, arrestation…
Il est donc essentiel de mettre en réseau tous ces
militants de « l’objection de conscience pédagogique ».
Des collectifs sont appelés à se mobiliser, à réveiller les
esprits trop souvent endormis. Que ce soit en France ou
en Belgique, les missions d’une École émancipatrice sont
menacées. Interrogeons un exemple récent : les épreuves
externes liées aux différentes enquêtes auxquelles sont
soumises les écoles, auxquelles se soumet la majorité des
directions et des enseignants. N’est-ce pas là un système
qui renforce les inégalités sociales et tend à standardiser
des populations scolaires pourtant différentes ? « Un outil
fait pour aplatir suit sa logique de marteau » comme le
dénoncent si bien les auteurs. Et les inspections dans nos
écoles… logiques de la culture de l’évaluation et de la performance
individuelle qui s’insinuent dans tous les pores
de nos établissements : « La température est devenue le
seul sujet auquel on s’intéresse
». Comment résister ? Lire
d’urgence « cette petite histoire de l’école qui résiste ».
Découvrir le vécu et les expériences de ceux qui nous ont
précédés, c’est déjà prendre le maquis…

Laurence Biberfeld & Gregory Chambat, Apprendre
à désobéir, petite histoire de l’école qui résiste, Coll. N’Autre
école, Éd. CNT-RP, 2012.