Plus notre ambition nous amène à vouloir faire réussir les élèves les plus fragiles, plus cela demande d’efforts et coûte cher. (…) On veut bien à la rigueur payer pour que “les pauvres” fassent des études mais à condition que cela ne coûte pas plus cher (et si possible moins) que les études des “riches”. Et nous continuons à arroser là où c’est mouillé »
Ph. Meirieu, « Cesser d’arroser là où c’est mouillé », in Café pédagogique, cité par Noëlle De Smet in « Mixité sociale qu’ils disaient »
Le pacte ou l’ « Inventaire » de Prévert !
« Une pierre
deux maisons
trois ruines
quatre fossoyeurs
un jardin
des fleurs
un raton laveur
une douzaine d’huîtres un citron un pain
un rayon de soleil
une lame de fond
six musiciens
une porte avec son paillasson
un monsieur décoré de la légion d’honneur »….
Bon, alors, ce « pacte », il en est où ?
Puisque CGé a décidé de s’impliquer dans ce processus pour aller y porter ses enjeux prioritaires, il est temps de prendre un peu plus de recul qu’entre deux séances de groupes de travail et, en écho à ce que vient de rédiger Bernard Delvaux, de dire quelques mots sur l’état du processus et des réflexions en cours.
A l’instar de l’ « inventaire » de Prévert, dans le Pacte, ou plutôt dans la synthèse de ses deux premiers groupes de travail, il y a beaucoup mais vraiment beaucoup de questions qui sont abordées …
Bernard Delvaux[1] « Pacte pour un enseignement d’excellence : Peut-on encore le faire changer de cap ? » – 15 juillet 2015 rédigé par Bernard Delvaux pense qu’il faudrait « tenter de le faire changer de cap ». Nous pensons qu’il faudrait plutôt donner à ce pacte un cap plus affirmé.
Si on liste toutes les questions abordées et ce qui est dit, tous les grands acteurs peuvent y trouver leur compte et c’est bien ça qui chiffonne : les seules questions non consensuelles sont consignées comme telles avec les précautions oratoires nécessaires : « certains pensent que », « d’autres…. ».
Toutes ces questions en tension depuis belle lurette sont re-pointées sans être arbitrées :
• Sur les pédagogies à utiliser et ce qu’elles produisent
• Sur le suivi et l’encadrement des profs
• Sur la mixité sociale et scolaire
• Sur l’(ad)équation « écoles – métiers »
• Sur gouvernance et autonomie
Etc,etc…
Evidemment, on nous objectera avec raison que le processus n’en est qu’à ses débuts : à mettre en place les grandes balises qui serviront de repères et de cahiers des charges aux 12 groupes qui suivent. Et ce, après passage en gouvernement et parlement cet été. Mais sur quoi vont-ils se mettre d’accord, et surtout, sur quoi pourraient-ils ne pas être d’accord, à ce stade ?
Il n’y a pas de valence particulière donnée à l’un ou l’autre objectif…
Ajoutez à cela que l’avenir est annoncé au mieux à budget égal – alors que de nombreuses places seront à créer dans les années à venir et il y a de quoi être plus qu’inquiet sur ce dont va pouvoir accoucher le Pacte… Mais aussi, envie tout le temps de regarder dans le rétroviseur et d’être bien sûr qu’on ne fait pas « plus de la même chose », qu’on est bien réellement repartis de l’évaluation du Décret Missions et du Contrat pour l’Ecole, sûr qu’on va analyser les raisons pour lesquelles les objectifs fixés alors n’ont pas été atteints et plus encore, ce qu’on pense qu’il aurait fallu faire et comment pour les atteindre.
Et donc, CGé ressort de ces 6 mois de travail dans le cadre du Pacte avec le sentiment que changer réellement l’école se passera ailleurs que dans ce grand barnum … à la fois en-deça et au-delà de tout ce qui a été dit dans le cadre des deux premiers groupes de travail.
a. Sur le fonctionnement du Pacte à ce stade :
Notre demande de sortir de « l’entre-soi » habituel des acteurs traditionnels de l’enseignement a été pour partie entendue puisque nous fûmes admis dans le GT2 avec quelques autres acteurs de la société civile.
Le GT1 a choisi de fonctionner à guichet fermé en faisant des appels à contribution qui ont été incorporés dans la réflexion du groupe et en associant contractuellement un grand contributeur extérieur : Mac Kinsey, à qui il a été confié l’établissement d’un diagnostic du système scolaire en Communauté française.
Mais il va de soi que le vrai lieu de pouvoir et d’arbitrage sur les travaux produits (et un premier filtrage des idées retenues) est entre les mains du groupe central qui est, lui, totalement et uniquement constitué par les acteurs traditionnels de l’école (PO, syndicats, grandes organisations représentants les parents, cabinet et administration). Là, cette idée d’élargir la vision en introduisant des acteurs-clé hors école reste lettre morte.
Nous réitérons notre constat que les publics les plus en difficultés/les plus en rupture/les plus maltraités par l’école sont peu représentés, d’où notre cheminement en parallèle vers la constitution d’un « autre » observatoire et notre volonté de contribuer à organiser une matinée de confrontation entre des représentants de ces publics-là et les représentants politiques et de l’enseignement.
Quant au comité d’accompagnement et à son rôle, force est de reconnaître que, même si certaines notes ont été reçues dans des délais trop courts pour se les approprier avant de devoir se prononcer, tout (sauf l’intégrale du rapport de MacKinsey qui est restée confidentielle) lui a été soumis pour approbation et les commentaires qui y ont été formulés ont été soigneusement consignés dans les PV. Mais face au volume et au rythme des travaux qui lui ont été soumis, les commentaires du comité d’accompagnement ont été relativement ponctuels et limités.
Notons par ailleurs que l’idée, énoncée par la Ministre, d’associer largement les autres grandes familles politiques – pour que ce qui sortira du pacte soit porté dans la durée et pas remis en question directement par le gouvernement suivant qui aurait une autre majorité – n’a pas été traduite dans le processus du pacte : les écolos et les libéraux ne sont nulle part impliqués dans le processus avant le passage au parlement.
b. Sur le fond de ce qui a été produit : état des lieux momentané au regard de nos attentes
Est-ce de grands plans et de grandes idées que manque la note de synthèse du Pacte ? Notre impression est qu’elle manque plutôt de pragmatisme et d’engagements forts en termes de réduction des inégalités.
Son point de départ est l’insuffisance de performance de notre système scolaire, ce qui rencontre l’assentiment de tout le monde mais dès qu’on creuse, le consensus se dégonfle : de quelle performance parle t-on et au service de qui ? de quoi ?
Oui, l’école est dans de multiples impasses…. Ça, c’est indéniable.
Un indicateur montre que l’enseignement a un problème général : même dans les milieux favorisés, la sous-traitance pédagogique externe est de plus en plus nécessaire. L’école serait donc de plus en plus incapable de mener des cohortes même favorisées à bon port ? Ou ces familles recherchent elles toujours plus d’ « excellence » pour leur progéniture ?
Oui, l’école doit à la fois se rénover pour vivre avec son siècle ET rencontrer enfin ces objectifs démocratiques élémentaires de réduire[2] et pas de les aggraver, comme c’est le cas actuellement les inégalités sociales, de donner des compétences de base à tous et de former de vrais citoyens. Ceci ne peut se faire dans une situation d’apartheid où les jeunes de différentes origines sociales et culturelles ne se croisent pas.
Oui, notre système scolaire fonctionne sur une logique de compétition / concurrence, au sein des classes, des écoles, entre les écoles et les réseaux, aboutissant à cette situation de « quasi-marché » régulièrement dénoncée sans qu’aucune piste sérieuse ne soit évoquée pour en sortir : rendre les écoles déclassées plus attrayantes ne fait pas sortir du système de mise en concurrence mais les rend juste plus compétitives au sein de ce système !
Mais comment un consensus pourrait il se dégager pour sortir de la compétition à l’école / entre écoles alors que le monde est plus que jamais dans la compétition ?
Pour CGé, les deux plus gros problèmes de notre système scolaire sont la ségrégation et l’échec scolaire massif des enfants défavorisés .
De quoi avons nous besoin pour avancer ?
1. D’une vraie interpellation de l’état et du système scolaire par les parents des classes populaires et d’autres acteurs qui travaillent aux côtés de ces enfants et qui demandent des comptes sur la façon de traiter leurs gamins en les reléguant massivement dans le professionnel et le spécialisé ;
2. D’un pacte fort avec les classes moyennes et supérieures et entre la droite et la gauche, idéalement pour affirmer et porter un autre projet de société ; au minimum, pour immuniser une zone en amont de l’arène, où l’on puisse faire vivre une expérience collective respectueuse de l’apprentissage des fondamentaux de la vie en société à tous les enfants ;
3. d’une vraie alliance pédagogique avec tous les systèmes qui forment les profs pour équiper ceux-ci à travailler avec des classes hétérogènes socialement et culturellement et les amener à bon port, ce qui nécessite de revisiter les représentations et l’outillage des formateurs d’enseignants ;
4. de temps et de procédures pour l’organisation et la gestion du système scolaire du plus haut niveau au dernier chaînon de l’école, afin que ce qui est/sera démocratiquement décidé en termes d’orientations du système scolaire puisse être réellement mis en œuvre. Mis en œuvre avec tous les acteurs de l’école et pas contre ou malgré eux.
1. Besoin d’une vraie interpellation de l’état par les parents des classes populaires et d’autres acteurs qui travaillent aux côtés de ces enfants et qui demandent des comptes sur la façon de traiter leurs gamins en les reléguant massivement dans le professionnel et le spécialisé
Ce qui permet au système de continuer à fonctionner comme il fonctionne, c’est que globalement, on ne lui demande pas de comptes : les familles de milieux populaires ont intériorisé la responsabilité de l’échec et quand la colère monte chez l’un ou l’autre parent, elle ne trouve pas à s’exprimer d’une manière qui soit audible et vécue comme légitime par l’école ; elle se retourne régulièrement contre l’enfant concerné qu’elle marginalise un peu plus.
Avec d’autres organisations[3]avec la FEBISP, l’InterFédé, la FFEDD, le RWLP, Lire & Ecrire et des regroupements de parents de milieu populaire , CGé travaille à contribuer à générer cette parole au sein d’une coalition.
Mais si les parents de milieux populaires demandent des comptes à l’Etat et au système scolaire, ils seront probablement interpelés en retour sur leur nécessaire contribution à l’éducation scolaire de leurs enfants. Or, ces parents n’ont pas la responsabilité de les amener à bon port sur le plan pédagogique : s’ils se sentent et sentent leurs enfants respectés et soutenus par le système scolaire, ils peuvent devenir les alliés de l’Ecole et lui apporter à leur tour le soutien dont elle a besoin.
Y a-t-il une issue hors rapport de force ?
Selon nous, non mais il faut compléter l’organisation de ce rapport de force par une vaste opération de sensibilisation des parents des classes moyennes sur l’importance et l’enjeu que les enfants grandissent ensemble.
Parce que cette revendication de déségrégation et d’acquisition des fondamentaux par tous a non seulement de la légitimité mais elle est une nécessité pour « faire société ».
Quand des jeunes sortent d’écoles « ghettos de pauvres » avec de cuisantes expériences d’échec et d’humiliation, ils ont un mal fou à trouver une place/leur place dans la société et bon nombre d’entre eux ont la haine. Inversement, quand des jeunes sortent d’écoles ghettos de riches, avec des expériences avérées de compétition et la confirmation de leur « supériorité » intellectuelle et de leur identité d’ « élite », ils ont un mal fou à comprendre qu’un projet de société pour le mieux vivre ensemble est possible. Ils cherchent à valoriser sur le marché les compétences qu’ils ont durement acquises et sont prêts à se battre pour cela.
2. Besoin d’un pacte fort avec les classes moyennes et supérieures et entre la droite et la gauche, idéalement pour affirmer et porter un autre projet de société ; au minimum, pour immuniser une zone en amont de l’arène, où l’on puisse faire vivre une expérience collective respectueuse de l’apprentissage des fondamentaux de la vie en société à tous les enfants
Ce qui nous interpelle le plus, c’est ce fossé entre nos convictions de citoyens et nos comportements de parents face à l’école : très peu de parents diront ou pensent que la séparation sociale des enfants dans les écoles est bonne et légitime. Mais tous les parents plutôt favorisés et conscients des enjeux qui se jouent à l’école veulent pouvoir choisir l’école de leur enfant et ont le sentiment que dans toute une série d’écoles où les enfants de milieu populaire (et d’origine étrangère dans les grandes villes) sont majoritaires, le niveau et la qualité de l’enseignement sont très mauvais.
Et dans la situation actuelle, c’est régulièrement vrai[4]4. C’est ça qui maintient la possibilité d’apartheid.
La question sur laquelle nous pensons qu’il faut travailler est la suivante : « A quelles conditions les parents de la classe moyenne sont-ils prêts à une réelle mixité ? Et quels sont les craintes et les freins en présence ? ».
Deux conditions sont légitimes mais valent pour tous les parents et pour tous les enfants :
– Ne pas tomber dans des écoles « ghettos », ni ghettos de riches, ni ghettos de pauvres ;
– Recevoir un enseignement de qualité, qui exige et reconnait etc…
Quand on voit que le décret inscriptions fait déjà polémique alors qu’il n’agit que TRES marginalement – sur un arbitrage de 20% de constitution de la cohorte d’élèves des seules écoles où il y a plus de demandes que de places -, on mesure le chemin à parcourir et les résistances à vaincre. Car ce décret n’a pas pour ambition de mixifier mais bien de réguler les inscriptions. Et les éléments d’information fournis par le cabinet sur les modifications du décret en préparation ne vont rien régler fondamentalement par rapport à cette question de la ségrégation scolaire.
Nous n’entendons pas l’ambition des grands acteurs du pacte sur cette question alors qu’elle urge.
La distinction amenée entre inégalités endogènes à l’école et inégalités exogènes nous a laissés totalement sur notre faim et notre réaction, qui allait dans le même sens que celle de la CGSP, n’a pas été prise en compte : évidemment, les inégalités externes au monde scolaire se cumulent et assignent les individus et leurs enfants à des positions sociales dont il est difficile de s’émanciper, mais sachant cela, dédouanons-nous l’école ou réaffirmons-nous sa mission d’émancipation sociale, tout en prenant la mesure de ce qu’il faut mettre en place pour que ce ne soit ni un slogan, ni une mission impossible pour les profs ?
Et nous participerons à sa mise en débat au niveau de la population, notamment dans le cadre de la campagne «une Tout Autre Ecole» du mouvement « Tout Autre Chose » dont nous sommes membres.
3. Besoin d’une vraie alliance pédagogique avec tous les systèmes qui forment les profs pour équiper ceux-ci à travailler avec des classes hétérogènes socialement et culturellement et les amener à bon port, ce qui nécessite de revisiter les représentations et l’outillage des formateurs d’enseignants ;
En gros, voici ce que mettent en évidence les militants de CGé qui sont investis dans la formation des enseignants:
– Ils ne sont pas formés avec la réflexivité nécessaire : ils ne se sont pas interrogés sur leur propre rapport au savoir et ne sont majoritairement pas outillés pour travailler avec le rapport au savoir différent des enfants de milieu populaire[5]ni à se servir de l’hétérogénéité des élèves comme ressource pour favoriser les apprentissages en collectif : les systèmes de formation initiale et continuée des enseignants ont eu beau être réformés, on est toujours loin du compte ;
– Il y a ceux qui n’ont même pas conscience de cette question des inégalités et ceux qui se désespèrent car ils y sont sensibles mais n’arrivent pas à atteindre leurs objectifs pédagogiques ;
– Il y a, faute de soutien adéquat, une hémorragie d’enseignants (départs rapides après entrée en fonction), peu d’attractivité du métier et un nouveau profil de candidats de plus en plus présent dans les hautes écoles : des jeunes de milieu populaire et d’origine étrangère qui sortent eux-mêmes d’une scolarité actuellement au rabais (techniques de qualification ou professionnelles) et qui n’ont pas les acquis de base nécessaires[6]compétences disciplinaires et analyse sociologique de leur propre rapport au savoir
pour être profs dans le temps imparti…
Retenons des analyses explorées par le GT1 deux éléments qui devraient inciter à apporter toute l’attention aux enseignants et au processus d’appropriation des réformes éducatives :
– à population donnée, la qualité des pratiques des enseignants est un facteur décisif pour expliquer la différence de niveau entre élèves ;
– quoi que l’on décrète pédagogiquement, les changements ne sont effectifs que là où il y a eu un réel travail d’accompagnement des équipes.
L’équation devrait donc être : « reconnaître, exiger et soutenir » pour les élèves ET pour les professeurs. Interrogés sur l’impression la plus forte que des jeunes en situation de grande pauvreté gardent de leur scolarité, ils répondent : la honte ! Et il y a fort à parier que l’impression dominante qui émerge de l’expérience de bon nombre d’enseignants dans leur rapport à l’ « Etat organisateur de l’enseignement » est au mieux la non-prise en compte, au pire, le mépris.
Si nous n’arrivons pas à sortir de ces deux impasses en miroir, rien de meilleur ne peut probablement advenir.
4. Besoin de temps et de procédures pour l’organisation et la gestion du système scolaire du plus haut niveau au dernier chaînon de l’école, afin que ce qui est/sera démocratiquement décidé en termes d’orientations du système scolaire puisse être réellement mis en œuvre ; et mis en œuvre avec tous les acteurs de l’école et pas contre ou malgré eux.
Selon le rapport Mackinsey, les interventions sur le système éducatif portent généralement sur les structures et pas sur les processus, alors que ces derniers jouent clairement un rôle capital…
Mais cette zone de réflexion et d’action semble à la fois fondamentale, terriblement sensible et non-consensuelle ; à commencer par le mot utilisé: nous parlons d’organisation et de gestion du système scolaire et pas de gouvernance puisque ce mot apparait comme extrêmement chargé idéologiquement ! Probablement parce qu’il fut introduit dans la sphère publique par Margaret Thatcher dans les années 80 et donc profondément teinté de néolibéralisme et lié à idée de rationalisation des moyens et de privatisation.
S’il fut utilisé initialement dans le domaine privé et économique, ce terme de gouvernance est aujourd’hui largement repris dans le domaine de la gestion publique[7]On peut définir le mot « gouvernance » comme suit : « La gouvernance d’un système désigne les mécanismes au moyen desquels les mandataire(s) et les mandants articulent leurs intérêts … Continue reading.
Quoi qu’il en soit, quelle que soit la façon dont on le nomme, mettre en œuvre 100.000 équivalents temps pleins au sein de 2.600 établissements organisés par 1.000 pouvoirs organisateurs au sein de 4 réseaux pour accueillir et former 900.000 élèves est un défi organisationnel monumental dont toute la mesure n’a pas été prise.
L’organisation « à la belge » ne facilite pas la manœuvre : un système peu centralisé, avec délégation de pans entiers de missions de service public à des acteurs privés – dont certains préexistaient au système public mis en place -, avec la double casquette de l’Etat qui est à la fois le commanditaire de l’ensemble du système et le chef d’un des réseaux.
Sans entrer dans les détails de ces questions (car ce n’est pas notre zone de compétence), le pilotage de ce vaste système semble largement déficient sur le plan des ressources humaines, de sa dynamique et quant à sa capacité à allier souplement et respectueusement les missions de contrôle, d’évaluation et d’accompagnement. Et ce, sur un temps qui ne soit pas dicté par des échéances politiques extérieures mais bien par les besoins du système scolaire en lui-même, pour apprécier ce qu’il produit au regard des objectifs qui lui sont assignés et pour pouvoir procéder à des ajustements successifs cohérents et portés par l’ensemble des acteurs de ce système.
Paradoxalement, des catégories d’acteurs pouvant apporter une contribution au bon fonctionnement du système (au regard de nos objectifs) ont été mises en place au fil des années mais c’est comme si on avait oublié de prévoir l’utilisation active de leur savoir et de leurs potentialités dans la gestion du système : de prévoir positivement ces interactions (nous pensons à des acteurs ou instances de type très différent comme la COPI[8]La COPI = la commission de pilotage de l’enseignement, les PMS, les EDD[9]les EDD = les écoles de devoirs ou encore les médiateurs scolaires etc…).
En guise de conclusion momentanée
Sur ses enjeux fondamentaux qui sont la fin de la relégation scolaire des enfants de milieu populaire (relégation sur les plan pédagogique et physique), CGé demande que le pouvoir politique se positionne plus clairement pour la deuxième phase du Pacte, et s’engage sous forme d’un plan, phasé sur 10 ans qui dit comment on va significativement changer ce fonctionnement qui relègue massivement et durablement les jeunes de milieu populaire.
Sans cet engagement fort, nous estimons que notre participation risque d’être instrumentalisée.
un petit garçon qui entre à l’école en pleurant
un petit garçon qui sort de l’école en riant
une fourmi
deux pierres à briquet
dix-sept éléphants
un juge d’instruction en vacances…..
_ Toujours extrait de « Inventaire » de J.Prévert.
Notes de bas de page
↑1 | « Pacte pour un enseignement d’excellence : Peut-on encore le faire changer de cap ? » – 15 juillet 2015 rédigé par Bernard Delvaux |
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↑2 | et pas de les aggraver, comme c’est le cas actuellement |
↑3 | avec la FEBISP, l’InterFédé, la FFEDD, le RWLP, Lire & Ecrire et des regroupements de parents de milieu populaire |
↑4 | 4 |
↑5 | ni à se servir de l’hétérogénéité des élèves comme ressource pour favoriser les apprentissages en collectif |
↑6 | compétences disciplinaires et analyse sociologique de leur propre rapport au savoir |
↑7 | On peut définir le mot « gouvernance » comme suit : « La gouvernance d’un système désigne les mécanismes au moyen desquels les mandataire(s) et les mandants articulent leurs intérêts et aplanissent leurs différences afin de réaliser leurs objectifs.( …) Enfin, la gouvernance d’un système est décrite par l’interaction participative entre les acteurs concernés à tous les niveaux . » in « Un essai de définition du concept de gouvernance » par Darine BAKKOUR – Université de Montpellier |
↑8 | La COPI = la commission de pilotage de l’enseignement |
↑9 | les EDD = les écoles de devoirs |