Ça veut dire quoi, réussir en maths ?

Être faible ou fort en mathématiques ne veut rien dire! On peut avoir de bons points en exécutant et en mémorisant ou être en «maths fortes» sans se poser de questions sur «c’est quoi faire des maths»…

Louise est en 5e année de l’enseignement général de transition. Elle a quatre heures de mathématiques par semaine. Elle voudrait s’inscrire en droit après ses secondaires.

« J’étais comme un entraineur de foot qui s’occuperait uniquement d’entrainement physique. »

Les maths, elle n’aime pas et ça se voit dans ses résultats! C’est la fille d’une copine; Louise est venue chez moi pour que je l’aide à comprendre son cours de mathématique. Du moins, c’est ce que j’ai cru qu’elle allait me demander.

Exécute et réussis!

Pendant deux ans, deux heures chaque weekend, Louise venait avec des exercices d’algèbre, de trigonométrie, d’analyse de fonctions… des pages d’exercices de son manuel de mathématique. J’ai essayé de lui faire comprendre l’origine de ces domaines ou l’intérêt de l’analyse de fonctions. Rien n’intéressait Louise. Ce qu’elle voulait, c’était faire le maximum d’exercices parce qu’en évaluation, c’était ces exercices que son enseignant lui demandait de résoudre!

Ceux-ci n’étaient que des exercices d’entrainement, jamais le moindre défi ou problème à résoudre. J’étais comme un entraineur de foot qui ne parlerait, ni de tactique, ni de stratégie, ni de jeu collectif et qui s’occuperait uniquement d’entrainement physique.

Je me suis soumise à sa demande et ça a marché : Louise n’a plus eu d’échec en mathématiques!

Mémorise et réussis!

Helena était une de mes élèves en primaire. Docile, attentive, sans être à l’origine de questions dont la classe se serait saisie, mais rentrant facilement dans les discussions suscitées, je la considérais comme une élève moyenne, capable de suivre un cursus scolaire en général, du moins en début de secondaire.

En 1re année du secondaire, Helena m’a demandé de l’aider en mathématiques, enfin en «calcul avec x», disait-elle. Je l’ai vue deux fois. Lors de notre première rencontre, je lui montre comment «isoler x». Elle accepte d’essayer de résoudre quelques équations très simples, mais semble ne pas être intéressée par mes explications. Lors de notre seconde rencontre, je comprends pourquoi. Helena me demande de l’aider à mémoriser la résolution de vingt-cinq équations écrites et résolues sur une photocopie. Son professeur de mathématiques a annoncé que le contrôle porterait sur cinq de celles-ci. Helena en a déduit, et on peut la comprendre, qu’il suffisaitd’étudier par cœur les résolutions pour réussir! J’ai tenté de lui expliquer que ce n’était pas possible et que cela ne servirait pas à grand-chose pour sa formation en mathématiques. Nous avons poursuivi le travail pendant une heure, en tentant de comprendre les règles du calcul algébrique nécessaires à la résolution des équations du premier ordre.

Je ne sais pas si Helena a réussi son évaluation : je ne l’ai plus revue!

Bravo, tu es forte en math!

Louise et Helena ne sont pas ce qu’on appelle des bonnes en maths.

Mais, même quand on l’est, cela veut dire être capable de quoi? De mémoriser des règles les unes après les autres et de les appliquer sans fautes? En travaillant comme ingénieur civil, j’ai eu très peu besoin des mathématiques telles qu’elles m’ont été enseignées…

Quand j’ai repris des études d’institutrice primaire, j’ai commencé à me poser des questions sur l’origine de certains concepts de mathématiques (qu’est-ce qui a amené les mathématiciens à développer le calcul intégral?), sur l’intérêt du calcul algébrique (mais pourquoi donc essayer de factoriser ces foutues expressions algébriques?), sur l’utilité de la trigonométrie (dans quels domaines des mathématiques, ces calculs dans les triangles peuvent-ils servir?), etc.

Je me suis rendu compte que relever des défis, c’était ça faire des mathématiques! Chercher, faire des hypothèses, se planter, voire ce que d’autres proposent et comprendre comment, historiquement, certains les avaient petit à petit résolus. Voilà tout ce que l’École ne m’a jamais appris et qui est pourtant passionnant!