Les écoles fondamentales peuvent faire appel à la Coordination Éducation & Santé pour les aider à lancer un projet santé à l’école.
Nous leur proposons alors de les accompagner par diverses interventions et par un « guide de voyage » avec des pistes pour organiser leur projet et réaliser le carnet de bord de celui-ci.
Préalablement nous envoyons une lettre aux enfants dans laquelle nous leur demandons de répondre à deux questions : « C’est quoi la santé pour vous ? » et « Que faut-il pour se sentir bien à l’école ? » Nous leur suggérons d’en discuter entre eux et de commencer le travail.
Plus tard, nous nous rendons dans les classes et nous leur posons d’autres questions sur les débuts du projet : Comment ça a commencé ? Ça a été décidé comment ? Est-ce que vous vous souvenez du début du projet ? C’est parti de quoi ? Est-ce que vous faites le lien entre voyage et projet ? Comment ? Pourquoi ? Quelles ont été les étapes jusqu’à présent ? Vers quoi allez-vous avec ce projet ? À quoi cela peut-il servir de le raconter ?
Notre regard extérieur permet souvent de situer les activités en lien les unes avec les autres. Par le simple jeu des questions et des réponses, le projet prend corps : une suite d’activités devient un tout cohérent où une idée en amène une autre, où tout s’imbrique et prend sens…
L’occasion de raconter, de faire découvrir permet de valoriser le projet de la classe.
L’enseignant, qui écoute et qui aide les élèves à se souvenir, perçoit mieux la lecture que ses élèves font de la proposition qu’il leur a apportée car pour ceux-ci, les activités qui ont été menées s’inscrivent parfois plus ou moins clairement dans le cadre du projet. Ce moment lui permet aussi de remettre en question sa démarche : il voit ce qui est pertinent, ce qui a trouvé du sens et ce qui peut réajuster ses méthodes et ses propositions.
Les élèves se plongent par petits groupes dans des livres sur les carnets de voyage que nous amenons. Ils ont pour consigne d’observer et d’échanger entre eux sur ce qui fait la spécificité de ce type de livres. Qu’est-ce qu’on trouve dans un carnet de voyage qu’on ne trouve pas dans un autre livre ?
Ce qui saute aux yeux dans les carnets ; c’est la liberté d’expression, d’organisation de la page, du choix des techniques et matériaux utilisés, de langage. Dans un carnet, on peut dessiner, coller, accrocher, plier, copier, rater, gommer, déchirer, colorier, tacher, griffonner. On peut aussi écrire pour décrire, préciser, faire ressentir, communiquer, raconter, compléter, rêver, inventer, se tromper…
En vrac, les observations des élèves et leurs commentaires lors de la découverte des carnets de voyage : « Il y a quelquefois n’importe quoi, il y a des choses étranges, c’est écrit à la main, c’est pas toujours lisible, il y a des photos, des ratures, des choses qui se superposent, des photos continuées par un dessin, dans un carnet. » Nous disons ce que nous avons vu et ce que nous n’avons pas vu, nous parlons du monde comme nous l’imaginons. « C’est pas écrit droit, ça ressemble à du bricolage, il y a de vraies fleurs, des pièces, des insectes, des objets collés. Les carnets sont tous différents, les images débordent, tout est rempli… »
Ça donne envie de « faire aussi », ça rassure, il n’y a pas de « bons » ou de « mauvais » carnets, ça attise la curiosité, nous entrons dans l’univers de quelqu’un, presque dans l’intimité du voyageur… et puis, c’est la découverte d’une nouvelle forme de récit offrant mille possibilités d’exploitations pédagogiques.
Après cette découverte, nous partons avec les élèves pour un voyage de quelques minutes dans la cour de l’école… un voyage duquel ils rapporteront des souvenirs, des traces… Nous nous équipons alors, non pas de matériel sophistiqué, mais d’un simple morceau d’adhésif transparent.
Le voyage commence, l’œil observe d’un regard curieux cet environnement familier qui prend soudain des allures de paysages extraordinaires…
Avec beaucoup de facilité et d’efficacité, nous glanons, nous ramassons des éléments épars, colorés, vivants, séchés, abimés, écrasés… et rapidement, chacun obtient une accumulation formant une composition d’éléments « souvenirs ».
De retour en classe, chacun colle son morceau d’adhésifs sur une feuille blanche.
La page fait alors tout de suite penser à certaines pages observées dans les carnets. Il manque l’écriture et le dessin pour faire parler cette récolte. Que nous racontent ces traces ? Il faut les observer, imaginer des questions à se poser : qu’est-ce que c’est ? D’où ça vient ? Pourquoi c’était là où je l’ai ramassé ? Quelle forme ça a ? Quelle couleur ? À quoi ça ressemble ? Que puis-je en dire qui ne se voit pas sur ma page ? Etc. Petit à petit, les idées fusent, les croquis et les mots apparaissent autour de l’image…
Ces différentes étapes ont pour but de mettre la classe en appétit, d’encourager la créativité des élèves et de l’enseignant dans l’élaboration et dans le récit. L’ouverture apportée par les animations nous indique à chaque fois que l’univers des carnets de voyage est favorable à la créativité, à l’imagination et à la liberté d’expression.
Et la santé dans tout cela ? Le concept de promotion de la santé a beaucoup évolué depuis l’idée que diffuser de l’information ou donner des cours sur la santé allait changer les choses. La démarche proposée insiste davantage sur la dimension participative pour construire un projet santé avec les élèves plutôt que sur des comportements prescrits. Dans notre manière de faire, nous y ajoutons un ingrédient à la fois artistique, pédagogique et collectif pour croiser les regards entre élèves, enseignants et les intervenantes « santé » que nous sommes.