L’objectif d’un Conseil, dans un groupe d’enfants ou de jeunes, est de leur donner voix au chapitre et du pouvoir sur l’organisation de leur vie en groupe, dans le but, notamment, d’un mieux vivre ensemble, mais, surtout, d’un mieux apprendre ensemble.
Instituer un Conseil — c’est-à-dire décider qu’il se tienne — vise l’amélioration des apprentissages dans la coopération. S’il n’est destiné qu’à maintenir la discipline, le pouvoir du maitre ou du responsable du groupe, le dispositif d’une part ne tiendra pas, mais ne représentera surtout que la caricature de la volonté d’une éducation émancipatrice, inaugurée par le mouvement d’éducation nouvelle au XIXe.
Le Conseil, dans un lieu où se tente la Pédagogie institutionnelle, est non seulement l’institution majeure qui ne doit en aucun cas rester la seule, mais s’impose comme la seule qui ne peut pas être supprimée.
Gilbert Mangel raconte comment un jour, ses élèves de collège décident, en Conseil, de supprimer le Conseil. Il demande : « Qui décide alors ? » « Vous M’sieur ! » « Le Conseil se tiendra donc jeudi à 15 h 30. »
Quitte à le refermer, au bout de dix minutes, en expliquant pourquoi, s’il dysfonctionne au point de ne plus jouer son rôle de régulateur, pour le rouvrir la semaine suivante, le même jour, à la même heure. Car, il est préférable d’interrompre un Conseil que de vivre et faire vivre au groupe un moment de chaos, alors que c’est le contraire qui est recherché. Si le Conseil est ressenti par le groupe comme un temps où personne n’a plus aucun pouvoir, il est nuisible, déstructurant et mieux vaut qu’il ne se tienne pas.
Partager le pouvoir (mais pas tout le pouvoir, le maitre reste le maitre) est le but premier d’un Conseil. L’ouvrir et le faire se tenir, coute que coute, semaine après semaine, peut être une épreuve, mais une manière efficace de signifier son importance et le fait que ce lieu-là, de toute manière, existe, a existé et existera.
Pour signifier son importance, le Conseil se tiendra le même jour, à la même heure, selon la même disposition spatiale, le même déroulement, le même ordre du jour type, les mêmes maitres-mots (voir encadré).
La règle préalable, non négociable, doit rester : la parole est distribuée par le président à qui l’a demandée en levant la main.
Boite J’ai à dire, onglets selon l’ordre du jour dans un cahier, rubriques dans un tableau… où les enfants écrivent, tout au long de la semaine, d’un Conseil à l’autre, etc. ou ordre du jour apporté par le maitre. Le premier Conseil peut s’ouvrir par la question du président : « Comment va la classe, le groupe… ? »
Exemple d’ordre du jour type : j’informe, le tour des responsabilités/métiers, je propose, je félicite et je critique…
Il est préférable que l’adulte responsable garde la présidence, tant que le Conseil ne fonctionne pas normalement et, tant que dans la classe, il n’y ait pas d’enfants ayant acquis les compétences pour le présider, car d’autres activités instituées (Quoi d’neuf, présentation d’objets, responsabilité d’équipe…) peuvent représenter autant d’occasions de les acquérir.
Deux secrétaires notent les décisions, clairement énoncées par le président : « La décision est prise : nous apporterons… pour…. ; Untel, Untel et Untel se chargent de… »
Les notes des secrétaires sont l’objet d’un travail de reprise par le maitre et les deux secrétaires pour mettre la mise au propre du compte-rendu dans le Cahier de décisions. Très important et précieux, ce cahier est la mémoire et le lieu où s’inscrivent les décisions de la classe émanant du Conseil, il est l’une des institutions clés de la classe.
Un responsable du temps a l’œil sur la pendule et informe le président qu’il est l’heure de passer à la rubrique suivante.
C’est la compétence (et le rôle) du président quand une discussion devient oiseuse, quand un ou des enfants entrent en dérision, ou perturbent délibérément. Le rôle du président c’est de donner un rythme au Conseil : « On n’est pas là pour s’amuser, mais pour gérer la vie de la classe. »
… et reporter au Conseil suivant les questions non résolues : « La question est reportée à la semaine prochaine. » Les secrétaires le notent pour mémoire. Il est intéressant au début du Conseil de relire les décisions du Conseil précédent.
On l’appelle le Ça va, ça va pas en Pédagogie institutionnelle. Il est très important surtout pour ceux qui ne se sont pas ou très peu exprimés. Ce n’est pas un moment d’échanges, la discussion ne reprend pas, chacun parle à son tour et est écouté.
Si le Conseil a été houleux, ce moment-là doit absolument être un moment tenu. À peine cinq minutes, chacun fait court et dit au minimum : « ça va ou ça va pas » S’il dit : « Ça va pas », il peut être invité par le président à en dire plus : « Tu veux en dire plus ? Tu veux dire pourquoi ? » Le Ça va, ça va pas doit être un moment d’écoute et de silence qui permettra à chacun d’être entendu dans son dernier mot concernant le moment qui vient d’être partagé par le groupe. Il est possible de demander que ce tour de parole porte sur « moi, ce Conseil… » Le maitre (qui a présidé) parle en dernier et mesure ses mots.
Le Conseil ne dispense en aucun cas le responsable du groupe d’assumer sa place, de jouer son rôle, ou d’exercer le pouvoir que lui donne sa fonction, mais de l’exercer autrement : en le partageant.
C’est un outil de gestion d’un groupe qui peut aider à nuire le moins possible.
Le Conseil idéal, pacifié, n’existe pas. Il est normal qu’au début, le déroulement d’un Conseil ne soit pas satisfaisant et qu’il faille tâtonner pour l’améliorer (avec les propositions du groupe et le résultat de l’analyse qu’en fait le maitre).