Dans le précédent numéro de TRACeS, vous avez pu découvrir les propos pour le moins critiques de certains enseignants à l’égard de la collaboration avec les agents ZEP/D+ et des projets qu’ils mènent au sein des écoles. Nous vous proposons ici un autre point de vue.[1]D’après des propos recueillis par les coordinations des ZEP/D+ de Schaerbeek/Saint-Josse et de Saint-Gilles, Naïma Bouih, Céline Masson, Valérie De Cruyenaere, Françoise Robin, en … Continue reading
Les projets D+ n’ont pas la prétention de révolutionner l’enseignement et les agents D+ n’ont pas pour objectif de donner des leçons aux enseignants et encore moins de les dénigrer.
En travaillant avec un agent D+, les enseignants se donnent la possibilité d’aborder autrement les apprentissages avec un animateur qui apporte « autre chose », un autre savoir-faire, non pas meilleur ou plus intéressant – on ne se situe pas dans la comparaison – mais bien différent en donnant au sujet étudié un éclairage complémentaire. « L’animation lecture D+/ZEP représente pour la classe entière une bulle d’air dans la semaine. C’est un moment d’apprentissage différent et nécessaire pour les enfants, un moment d’éveil précieux au monde, aux relations avec celui-ci que l’enseignant ne pourrait parvenir à réaliser avec ses seuls moyens pédagogiques. L’enseignant est loin de n’être présent que pour la discipline : l’animation est une ressource inestimable, un outil en plus mis à sa disposition, chose pour l’apprentissage » explique Kinda, institutrice dans une école libre de Schaerbeek. « Je ne peux que me réjouir de recevoir la bibliothécaire dans mes classes car elle donne aux élèves l’envie de lire et de s’ouvrir au vaste monde de la littérature » ajoute un professeur de français de l’Athénée A. Verwée (Schaerbeek).
Une collaboration riche
Certains enseignants aiment travailler à deux (ou plus) car c’est plus agréable et enrichissant pour mener un projet, atteindre un objectif, développer certaines compétences. Pour cela, « l’agent D+ ne dépossède pas l’enseignant de ses projets. Au contraire, il s’inscrit dans ceux-ci et collabore avec l’enseignant pour les réaliser » estime une enseignante de Schaerbeek.
« Nous avons depuis 15 ans de bonnes collaborations avec plusieurs agents ZEP et D+. Ils nous ont donné et nous donnent encore la possibilité d’avoir une ouverture sur le monde extérieur avec nos élèves. Ils participent d’une manière consciencieuse à nos projets avec le souci de les mener jusqu’au bout avec nous. Nous sommes sur la même longueur d’onde parce que nous préparons et évaluons ensemble. Une consultation permanente entre nous permet des liens avec les apprentissages. Nous, seules, n’aurions jamais osé commencer ni pu mener à bien ces projets. Ils nous ont mis en contact avec des personnes ressources extérieures bien utiles que nous avons appris à connaitre et apprécier. De plus, la collaboration avec l’agent D+ permet un travail inter-classes qui permet de souder le cycle et enfin, les projets menés ensemble font la fierté des parents » ajoutent Gratienne et Chantal du Centre scolaire Sainte-Marie (Saint-Gilles). Le directeur et leurs jeunes collègues s’associent à ce point de vue : « Nous avons le désir de continuer le travail de collaboration commencé avec les agents D+ dans l’école ».
Des projets et des évaluations
Lors des évaluations des projets que nous effectuons en fin d’année, nous avons l’occasion de rencontrer les enseignants qui nous parlent de l’intérêt qu’a représenté pour eux de faire un projet de classe ou, ce qui semble plus ambitieux, de participer à un projet inter-écoles. « On nous laisse une marge de manœuvre et une liberté de choix quant au thème à travailler, par exemple. Ce type de projet favorise le travail en interdisciplinarité, ce qui permet des échanges et des passerelles au sein de l’équipe pédagogique. Par ailleurs, cela m’a permis de faire des rencontres avec d’autres écoles de la commune. Et, ce qui n’est pas négligeable, on est soutenu financièrement pour réaliser nos objectifs et au cours du projet, on peut toujours demander un coup de pouce, une info (…) La D+ constitue un levier par bien des aspects au sein de l’école » explique Christiane, enseignante en secondaire à Saint-Gilles.
De la médiation
Le travail de médiateur est délicat et ce dernier peut parfois être confronté à des situations qui exigent un certain doigté ; il se retrouve souvent à l’interface entre la réalité de l’école et celle des enfants et de leurs familles, et ces deux mondes ne se comprennent pas toujours. « Le travail que les médiateurs abattent est important. Nous pouvons faire appel à eux, chaque fois que nous en avons besoin (retards répétés, absentéisme, décrochage scolaire,…). Ils sont un soutien pour les familles, mais aussi et surtout un relai entre tous les acteurs de la vie scolaire. La barrière de la langue à laquelle nous sommes confrontés est parfois comme le mur de Berlin, il est détruit grâce à ce personnel ZEP/D+ ! » dit une enseignante d’une école libre de Schaerbeek. Quant à la directrice de l’école fondamentale des Platanes, elle confirme qu’elle et son équipe se trouvent « très satisfaits de travailler avec nos médiateurs sociaux. Ils sont à la source de plusieurs projets qui renforcent l’échange culturel, la cohabitation entre les différentes communautés, la tolérance et l’acceptation de l’autre (faire visiter aux élèves les différents lieux de cultes, organiser régulièrement des rencontres avec les parents, …) ». « En résumé, le médiateur peut être celui qui permet la rencontre entre l’école et les parents » conclut un professeur du Centre Technique Pierre Paulus (Saint-Gilles).
Pour conclure, nous terminerons par cette phrase d’une enseignante de Schaerbeek : « Certains enseignants sont tellement découragés pour ne pas dire blasés, que de toute façon, ils critiqueront n’importe quelle initiative, aussi bonne soit-elle. Mais dans mon école, toute l’équipe des enseignants est unanime pour dire que les animations D+/ZEP sont indispensables. »
Durant l’année scolaire 2002-2003, une quarantaine de classes se sont lancées dans l’aventure des mots, à l’invitation du Partenariat inter-réseaux, inter-niveaux Discriminations Positives de Saint-Gilles. Le thème choisi était Apprendre à parler pour apprendre à se parler : les mots pour le dire. Une brochure de 78 p. veut faire partager les différents périples, enthousiasmes, difficultés, démarches, rencontres et acquis de tous ces enfants et ces jeunes. Nous présenterons plus longuement ce beau travail (qui peut donner des idées à d’autres) dans le prochain n° de TRACeS.
Notes de bas de page
↑1 | D’après des propos recueillis par les coordinations des ZEP/D+ de Schaerbeek/Saint-Josse et de Saint-Gilles, Naïma Bouih, Céline Masson, Valérie De Cruyenaere, Françoise Robin, en collaboration avec Noëlle De Smet |
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