Le « Décret inscription » pour l’entrée dans une école secondaire continue régulièrement à faire parler de lui à diverses périodes de l’année scolaire.
A CGé, nous continuons à réfléchir à propos du bien fondé de ce décret ainsi qu’aux réponses adéquates à trouver pour les questions qu’il pose. Dans ce contexte et parce que le débat est loin d’être terminé, nous vous faisons part de notre position, en réponse à une lettre ouverte de directions du réseau libre, en novembre dernier. Cette lettre date de quelques mois mais ses propos restent d’actualité. Nous vous la joignons pour mémoire et afin que vous puissiez prendre toute la mesure de notre réponse. Bonne lecture.

Bruxelles, le jeudi 2 mai 2013
Mesdames les directrices,
Messieurs les directeurs,
Au mois de mars dernier, les procédures d’inscription se sont clôturées dans le secondaire ramenant au-devant de l’actualité les questions qui y sont liées. Cette année encore, le décret Inscription est remis en cause. Dans ce contexte, nous avons relu votre lettre ouverte du 20 novembre 2012. Celle-ci a suscité des réflexions au sein de notre mouvement, ChanGements pour l’égalité, et nous voudrions vous en faire part.
De vos critiques, nous retenons principalement trois griefs : le surcroit de travail que cela vous occasionne, la difficulté d’adaptation des élèves qui rejoignent vos communautés éducatives, et la désaffection des sections générales des écoles en milieu populaire au profit d’établissements mieux cotés.
Rappelons d’abord qu’en définissant des règles objectives, ce décret a contribué à assurer le droit constitutionnel de tout enfant à fréquenter l’école de son choix, et cela, quelle que soit son origine sociale. Par le passé, c’était loin d’être le cas.
Vous énoncez des effets pervers du décret. Vous abordez certaines bonnes questions. Cependant, en demandant l’abrogation du décret, vous apporterez une « solution » radicale alors qu’il importe justement de construire des réponses plus adéquates. Le décret Missions auquel vous dites vouloir revenir a pour but d’aller vers plus d’émancipation ; le décret Inscription fait partie des mesures destinées à le mettre en œuvre.
Comme vous le signalez, ce décret apporte une charge de travail qui nécessite organisation et personnel supplémentaire. Il serait donc intéressant d’externaliser la procédure et de la généraliser dès l’entrée en maternelle pour que l’inscription dans une école soit totalement indépendante des établissements. Par ailleurs, CGé pense que cela garantirait une réelle transparence et de la neutralité.
Autre effet pervers : l’augmentation du nombre d’échecs que vous constatez et que vous imputez à l’isolement et aux difficultés d’adaptation des élèves dans vos établissements. Mais l’échec est-il seulement le problème de l’élève, ou également celui de l’école et des pratiques pédagogiques ? Que faites-vous pour favoriser l’intégration de ces élèves « isolés » ? Est-ce à l’enfant de trouver seul sa place ? Comment un enfant qui n’est pas reconnu dans son identité peut-il apprendre ? N’est-ce pas là le fondement de la mixité sociale ?
Comme vous le soulignez, il est vrai que si les « bons » élèves des écoles des quartiers populaires les désertent, celles-ci sont encore déforcées. Les écoles situées dans des poches de pauvreté devraient être renforcées par des projets réellement porteurs d’intelligence et d’émancipation. En s’appuyant sur les identités et les forces propres aux milieux populaires, ces écoles d’excellence qui restent encore à inventer construiraient de la dignité, là, où la honte et les échecs s’accumulent.
C’est en défendant ce type de projet et non en désarticulant ce qui a été fait qu’on contribuera à combattre la fracture sociale.
Ces questions sont au cœur des préoccupations de ChanGements pour l’égalité et nous sommes à votre disposition pour poursuivre le débat.
Avec nos salutations engagées.
Les militants de CGé