Édito

Pourquoi Freinet, Piaget, Lahire, Oury, Meirieu, Makarenko et les autres sont-ils autant absents des formations initiales et continuées des enseignants ? Parce qu’il faut d’abord avoir des pratiques, oser partir d’elles et les interroger pour les éclairer par les théories de ces « pères ». Pourquoi font-ils si peu repères dans les pratiques des classes aujourd’hui comme hier ? Parce qu’il faut d’abord avoir des connaissances, des théories, s’inspirer d’elles pour pratiquer, essayer, expérimenter à partir de ces mêmes « pères ».

Pour que ces pères puissent servir de repères, il faut d’abord des pratiques et d’abord des théories ! L’œuf et la poule ! Et qui fait, ou devrait faire le coq ? Les formateurs, les pairs, un mouvement pédagogique ! Pères et repères : repaire de ringards ou de résistants ? Qu’ont donc ces pères en commun d’aussi dépassé ou d’aussi subversif ?

Subversif, d’abord leur refus de cette opposition d’une pratique et d’une théorie qui s’excluent, de cette division du travail entre chercheurs et praticiens. Il n’y a pas de progrès sans expérimentation, il faut oser toutes les expériences, mais c’est mieux de les oser dans la filiation, en référence à ceux qui en ont déjà théorisé d’autres. Et il n’y a pas de progrès sans théorisations, sans mise en patrimoine, il faut oser toutes les théories, mais les oser dans l’expérimentation, en référence à des pratiques. Rien n’est aussi pratique qu’une bonne théorie et rien aussi théorisable qu’une bonne pratique…

Subversive ensuite, leur posture, et la contagion de cette posture, face au savoir et à la réalité. Ils ne se soumettent à aucun des deux. Comme Nicolas, ils sont pères généreux et fils rebelles. Ils nous invitent à construire et déconstruire à partir d’eux. Et avant d’être pères, ils ont été pairs aussi : subversive encore, leur posture sociale, ils ont fait réseaux, coopératives, groupes, mouvements…
Puissions-nous nous laisser contaminer par leur subversion et nous-mêmes en contaminer beaucoup d’autres !