Où ça ?
Un jeune comme toi doit avoir un projet personnel s’il veut réussir sa vie.
C’est quoi le projet personnel du jeune palestinien réfugié au Liban et bombardé par l’armée israélienne ?
Tu prends l’extrême. Là, c’est la guerre. Nous, on parle des gens d’ici. De ceux qui réfléchissent à leur avenir, font des choix et ont la volonté d’atteindre leurs objectifs.
Ah bon ! Tu veux dire que si Pauline, qui est en cinquième professionnelle « travaux de bureau », veut devenir directrice de Voici et qu’elle y pense très fort, elle y arrivera ?
Tu exagères encore. On ne peut pas tout obtenir dans la vie, il faut être raisonnable et réaliste. En sortant du secondaire professionnel, Pauline ne pourra jamais faire les hautes études commerciales.
J’ai peut-être compris… Avoir un projet personnel, c’est être capable de réfréner ses rêves… Ou de s’habituer à ne plus y croire quand on a de fortes chances de ne pas les atteindre… Ou mieux encore, de les accorder à l’avenir auquel on est plus ou moins destiné. En termes culinaires, on dirait que c’est l’art d’accommoder les restes.
Une façon bien pessimiste de voir les choses.
Non, non. En réfléchissant bien, là où je suis, à dix-huit ans, avec la formation que j’ai, le milieu d’où je viens et les appuis que je peux espérer, j’ai 80 % de chances d’être chômeur. Mais j’ai le projet d’être un chômeur épanoui de longue durée, de marier une femme au foyer, de bâtir une famille nombreuse équilibrée et d’attendre au jour le jour un avenir meilleur dans la plus grande sérénité.
Bah, on ne sait pas discuter avec toi.
Comment ça ? Nous, on a un petit projet collectif de jeunes et de moins jeunes, tu veux savoir ?
Pour sûr que je veux savoir. Je termine mon Traces de changements et je suis toute ouïe…