Edito

Le temps d’un nouveau petit matin est-il venu ou est-ce encore trop tôt ? Un petit matin collectif, ça fait toujours du bien sans espoir de Grand Soir. Isoler jusqu’au passif, c’est bien beau, mais c’est alors qu’on a besoin de chaleur humaine… Dernière ou pas, ce pourrait être une chance : une prise de conscience collective que tous, élèves et enseignants, individuellement, s’emmerdent toujours plus à l’école. L’ennui d’un grand nombre pourrait peut-être nous donner ce que l’enthousiasme d’un petit nombre n’a pas permis : l’articulation de l’individuel et du collectif !

Des salles de profs « tchoûloirs »[1] De tchoûler, pleurer, et tchoûlons, pleurnichards, en wallon liégeois., des conseils de participation bidons, des enseignants isolés-isolants, sans espace ni temps de travail commun, des classes organisées en isolats, des élèves physiquement séparés pour éviter toute interaction, des juxtapositions d’individus sans aucun projet commun, ni même de projets individuels, qui ne se demandent jamais ce qu’ils font là ensemble et encore moins ce qu’ils pourraient bien y faire d’autre, un agrégat d’inconnus en stand-by attendant la sortie… et surtout, surtout, des évaluations individuelles. Collectif ? Il n’y a même plus de punitions collectives, sauf que la vie scolaire en est devenue une permanente. Le collectif fait encore peur, mais l’isolement est tellement emmerdant et l’obsession évaluatrice tellement réductrice que cela pourrait bien changer.

Collectivement, il est urgent de réintroduire de l’instituant, rien que ça, tout ça. De la capacité collective à oser se demander ce qu’on fout et pourrait bien foutre ensemble, de la capacité d’auto-organisation. Des institutions qui permettent la coopération et la contestation.

Individuellement, il est urgent de réintroduire du divergent, de l’incertain, de l’Autre. Rien que ça, tout ça. De la capacité individuelle à chercher avec d’autres, de traiter des questions sans attendre de réponses, de l’intelligence. Des activités qui exigent de l’autonomie et de la coopération.

Il y a trop longtemps qu’à l’école, collectivement on se conforme et individuellement on répète. Le temps de la Résistance est revenu. Et pour entrer en résistance, il est indispensable de s’organiser, d’articuler l’individuel et le collectif. Qu’attendez-vous ?

Notes de bas de page

Notes de bas de page
1 De tchoûler, pleurer, et tchoûlons, pleurnichards, en wallon liégeois.