Édito 258

Souvent les enfants, mallette trop grande au dos et doudou sale à la main, l’ont bien compris dès le premier jour. Ils s’en réjouissent, en ont peur ou en pleurent : ils savent que l’école maternelle, c’est du sérieux. C’est partir sur un long chemin en dehors du cercle familial — ex ducere — vivre de nouvelles rencontres et apprendre tout doucement à déchiffrer les mystères de la culture humaine en s’inscrivant dans une relation au monde singulière. Avec les copains, avec madame (trop rarement monsieur), sans papa-maman. TRACeS voulait être là où tout commence et où tout le monde s’accorde à dire que c’est décisif pour l’ensemble du parcours de nos jeunes. Nous voulions faire le point quelques années après la mise en œuvre du référentiel Maternelles, du renforcement des équipes, de la gratuité et de l’obligation scolaire à cinq ans. Demander aux instits ce qui a (commencé) à changer ou pas pour rendre l’école plus formatrice et plus égalitaire; ce qui résiste, mais aussi ce qu’ils ont mis en place et dont ils sont fiers, et qui pourrait peut-être inspirer d’autres équipes. En classe, on voulait des articles qui abordent la primordiale question du langage. Comment fait-on pour faire grandir les gamins dans la formation de la pensée, entre les nez qui coulent et la mère qui colle aux basques ou qui dépose le matin l’enfant comme un bagage trop lourd ? À l’école normale, on voulait savoir si le cursus avait changé pour les futurs profs depuis le nouveau référentiel. Vous trouverez donc un numéro riche de récits de classes, de démarches, de témoignages et même de marrons. À travers ces instantanés de la vie en maternelle, ce sont les éternelles questions qui nous animent à CGé : l’école, cette vieille machine de sélection dès le plus jeune âge, est-elle vraiment en train de changer par la racine ? Est-elle enfin passée prioritairement en mode émancipation ? Et enfin, question essentielle : comment ça va la vie à l’école entre les princesses et la Pat’patrouille ?