Et après ?

Que deviennent les jeunes qui sortent de l’enseignement spécialisé secondaire ? Un seul chemin tout tracé ou divers sentiers possibles ? Y a-t-il de petits cailloux le long de la route pour ne pas se perdre ? À force de rencontrer des jeunes issus de l’enseignement spécialisé dans le doute face à leur avenir, des travailleurs d’une AMO en tant que service d’aide aux jeunes en milieu ouvert se sont intéressés à ces questions.

Au départ de ce travail, un constat des travailleurs en milieu ouvert, liés à la proximité avec une école d’enseignement spécialisé secondaire, pour les élèves type 1 forme 3. Un enseignement qui vise à donner une formation générale, sociale et professionnelle pour rendre possible l’insertion socioprofessionnelle, mais qui, dans la réalité, ressemble souvent à une classe fourretout où sont rassemblés des élèves en décrochage scolaire et des primoarrivants qui n’ont pas nécessairement de déficience intellectuelle, mais dont l’enseignement ordinaire n’a pas voulu…
Leurs locaux se trouvent à septante pas de l’école. Dans la rue avoisinante, en septembre, et plus tard encore, il n’y avait pas que les élèves inscrits qui étaient là, les anciens revenaient zoner dans le quartier. Pas facile d’entrer dans la vie active, de comprendre les démarches administratives nécessaires, d’être traité dans les différents services comme tous les autres alors qu’on a des difficultés qui ne sautent pas aux yeux, mais qui existent. Après plusieurs années dans l’encadrement fort de l’école, avec des professeurs avec lesquelles ils se sentaient en confiance, qui savaient prendre le temps et choisir les mots, l’ambiance d’Actiris peut déboussoler, difficile de comprendre toutes les informations ou d’oser poser une question, de faire répéter. Pas facile de trouver un stage, de faire les démarches au bon moment et pas quand les inscriptions sont clôturées. Bref, ces jeunes sont confrontés à une série de choix et de démarches qui bien souvent les dépassent. Il y a pourtant une diversité de services, d’ASBL, de projets qui existent pour les soutenir, mais il n’est pas simple de savoir à quelle porte sonner. Et les jours passent, parfois à la dérive, avec tout ce temps libre et pas grand-chose à faire.

Ne pas se tourner les pouces

L’équipe de l’Amo qui travaille à la demande, sur mesure, avec un jeune et/ou avec sa famille trouvait, à la suite de plusieurs demandes semblables, qu’il fallait donner à cette réflexion sur la transition des jeunes après l’enseignement spécialisé une force plus collective.
Même si le marché de l’emploi est ce qu’il est, que la société elle-même n’est pas inclusive, que les employeurs prêts à engager des jeunes sortants de l’enseignement spécialisé ne se bousculent pas au portillon, comment soutenir au mieux les jeunes dans ce passage de l’école à la vie après l’école.
Un forum a été organisé pour réunir les différents acteurs qui sont impliqués dans cette transition des jeunes : enseignants, travailleurs sociaux, psy, directions…
Le but étant d’articuler le travail des acteurs de l’école avec celui des acteurs de l’accompagnement à l’insertion socioprofessionnelle, comme Actiris, les missions locales, le service Phare, Bruxelles-Formation, et d’autres encore…
Regrouper différents acteurs, intervenir dans l’école à différents moments du parcours pour préparer l’après. Clarifier les différents parcours possibles. Il y avait du pain sur la planche et déjà aussi des initiatives à mutualiser.
Préalablement à ce forum, un film documentaire a été réalisé pour faire entendre la parole des jeunes concernés, leur regard sur leur scolarité dans l’enseignement spécialisé et l’après. Ce film est utilisé dans un cadre précis, celui d’une animation dans l’école spécialisée pour préparer à l’après. Avec un message clair : « Faut pas rester chez soi à se tourner les pouces. » Ne pas rester seul dans cette année qui suit la sortie, celle où on doute.
L’équipe a aussi créé un site pour les professionnels afin qu’ils puissent continuer à partager leurs expériences dans le domaine www.ecoleetapres.be.
Il faudrait s’attaquer aussi à des choix (qui intervient trop tôt dans le cursus, les élèves n’ont que douze ans…) d’options devenues obsolètes, comme encodeuse de données, pourtant encore présentes dans les cursus de l’enseignement spécialisé… Un combat à mener.