« J’ai dû être entendu comme témoin par un juge. L’affaire ne me concernait pas directement mais ça été terrible car j’ai eu l’impression d’avoir été comme un enfant, je me sentais humilié… »
Hervé sur France-info du 2 octobre 2004, rubrique Savoir être, multi diffusion le samedi matin.
Cette situation réelle, très pénible à vivre, montre à quel point, dans la vie, les choses se passent toujours à deux niveaux. Dans la réalité, Hervé ne risque rien, au contraire mais il y a un autre registre qui se superpose à la réalité et qui est celui de l’inconscient et qui fait que celui qui est innocent se vit comme un coupable qui va donc être châtié.
Ce qui revient dans ces moments-là ce n’est jamais n’importe quoi : ce sont des sentiments que l’on a déjà éprouvés, probablement dans la tendre enfance et qui nous ont profondément marqués.
Ça arrive à beaucoup d’enfants face à l’adulte de se sentir en faute et c’est généralement terrible pour eux. L’enfant imagine toujours que l’adulte sait -est- la vérité, donc qu’il va le maîtriser, le punir et, éventuellement, et c’est terrible, le rejeter.
Sa souffrance varie en fonction de l’importance que l’enfant accorde à la faute que l’enfant se reproche mais également en fonction de l’adulte : l’adulte sadique qui jouit de la peur de l’enfant ou l’adulte névrosé qui promet à l’enfant l’enfer parce que ce dernier s’est masturbé. Ca peut créer de véritables traumatismes, durables, enfouis mais prégnants. C’est en effet ce genre de traumatisme, devenu inconscient, qui revient à la surface, infecter la réalité.
Comme nous sommes des être parlants, ce que nous avons vécu est stocké dans notre inconscient, tenu en réserve hors de notre conscience. Ce qui est traumatisant est refoulé.
Ces mots, ce sont ceux qui nous sont venus à l’époque pour nommer, comme nous pouvions, ce que nous éprouvions, et qui nous sont particuliers parce que il peut y avoir mille façons de nommer, de se représenter, de « recréer » la même situation.
Or, quand nous vivons aujourd’hui quelque chose, nous le pensons/créons avec des mots également. Et bien, si ces mots se trouvent être les mêmes – ou entrent en résonance avec – ceux du passé, ils font revenir ceux du passé et avec eux, la charge émotionnelle qui les accompagne. On se retrouve donc avec une double charge : celle du passé et celle d’aujourd’hui.
C’est ce processus qui fait dire à Lacan que l’inconscient est structuré comme un langage.
La Psychanalyste Claude HALMOS interrogée par Claude DENAES
(diffusé dans le BI avec leur accord), texte écrit par Michel EXERTIER
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