On ne vous a pas encore tout dit : le décret inscription, stop ou encore?

Le décret inscription vit-il sa dernière rentrée ? D’après les chiffres de la CIRI, la Commission interréseaux des inscriptions, plus de 200 élèves sont toujours sans école aujourd’hui. Alors le décret doit-il être revu ? Il est en tout cas au cœur des négociations actuelles entre le PS, le MR et Écolo. François Gemenne, professeur à l’ULiège et Sciences Po Paris, et Frédérique Mawet, secrétaire générale de ChanGements pour l’égalité, ont débattu de la question sur la Première.

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Il avait été adopté pour favoriser la mixité sociale… Mais selon certains, il aurait plutôt tendance à privilégier les parents les plus doués en jeux de stratégie. En effet, il ressort d’une étude de l’UCLouvain qu’il s’agit, pour les parents, de ruser pour obtenir non pas le scénario souhaité, mais plutôt le moins pire. Dès lors, on ne parle pas tant de satisfaction, mais plutôt de choix stratégiques.

Les trois objectifs du décret
Frédérique Mawet tient à rappeler que certains des objectifs du décret ont été atteints, mais pas tous : “Il y en a trois. Primo, organiser de manière équitable et transparente les inscriptions. Cet objectif-là est atteint. Secundo, assurer à toutes les familles l’égalité d’accès et l’égalité de traitement dans le processus d’inscription. Cet objectif-là est atteint aussi. C’est le troisième qui n’est pas atteint, à savoir promouvoir la lutte contre l’échec scolaire, améliorer les performances de chaque enfant et lutter contre les mécanismes de relégation en soutenant la mixité sociale, culturelle et académique. Ça, effectivement, on n’y est pas du tout”.

Mais n’est-ce pas là l’objectif principal vers lequel tendait le décret ? “Si, répond Frédérique Mawet, mais ce n’est pas possible de l’atteindre juste avec un décret. Est-ce qu’il faut pour autant tout arrêter ? C’est comme supprimer le symptôme. Il faut rappeler que quand on dit que x nombre d’élèves n’ont pas d’école, ce n’est pas qu’ils n’ont pas d’école… C’est qu’ils n’ont pas l’école de leur choix. Les chiffres que donnait la CIRI en juin, c’était 668 élèves qui visaient des écoles de Bruxelles dans lesquelles ils n’arrivaient pas à entrer, mais il restait au même moment 1234 places dans 47 écoles de Bruxelles qui n’avaient pas de liste d’attente. Donc, qu’est-ce que ça montre ? Ça montre qu’il y a un vrai problème dans notre système scolaire. Certaines écoles sont très désirables et d’autres ne le sont pas “.

Pour elle, il ne serait pas judicieux de supprimer le décret. Il faudrait, au contraire, aller plus loin. Un avis que ne partage pas tout à fait François Gemenne : “L’objectif premier du décret était d’assurer une meilleure mixité sociale. Est-ce qu’on y est arrivé ? Il faut bien reconnaître que non”.

Dix ans après l’entrée en vigueur de ce décret, il est temps selon lui d’oser se poser certaines questions : “Qu’est-ce qui a marché ? Qu’est-ce qui n’a pas marché ? Si on a raté les grands objectifs du décret et qu’en plus, par effet collatéral, on crée du stress pour les parents et des perturbées pour 250 enfants, il faut pouvoir se demander s’il n’y a pas d’autres moyens d’assurer une meilleure mixité sociale et d’assurer une plus grande égalité entre les écoles. Je crois que le problème fondamental, et il faut quand même mettre le doigt dessus, c’est qu’il y a en Belgique, et singulièrement à Bruxelles, une très grande disparité de niveaux entre les écoles et ce n’est pas normal que les écoles soient si différentes dans leurs niveaux”.