Jehan est en première primaire et comme tous de son âge, il fait connaissance avec les nombres. Tout en se familiarisant avec des collections de cinq objets, il a dû construire des « pentaminos »[1]Cette activité est proposée dans le manuel de J. Maquoi, G.N. Müller et E.C. Wittman, Faire des maths en première année, Erasme, Namur, 2000..
Il devait en trouver le plus grand nombre possible, tous différents. De retour à la maison, il racontait son activité avec effervescence, mais était incapable de reformuler la consigne reçue. Beaucoup de parents auront été perplexes face au travail de leur enfant.
En réalité, un pentamino est une figure de cinq carrés se touchant par au moins un côté.
Le grand intérêt de cette activité est d’amener l’enfant à mener une recherche dès le plus jeune âge de la scolarité. Le problème est ici particulièrement bien choisi. Si on vous le propose, quel que soit votre niveau en mathématique, vous allez vous mettre à réfléchir. Peut-être même aurez-vous envie d’organiser vos trouvailles pour être certain de n’oublier aucun cas possible. En première primaire, ils n’en sont pas à ce stade là, mais ils sont amenés à raturer, se questionner et à identifier que deux pentaminos peuvent être identiques même si ils ont été dessinés dans un sens différent. C’est ainsi qu’en plus de développer un esprit de recherche, on les amène à voir dans leur tête.
Cette activité est un point de départ et fera l’objet de réinvestissements. A différents moments de la scolarité, on peut proposer à l’élève de construire des tetra-, penta-, hexa-, polyminos. En se servant des douze pentaminos, on peut se demander quelles figures on peut obtenir en les agençant comme les pièces d’un puzzle. On peut également observer si on y retrouve des symétries, procéder à des réductions ou agrandissements. Lorsque les élèves examineront des hexaminos, ils essaieront de dégager quels peuvent être les développements du cube parmi ceux ci. En utilisant ainsi plusieurs fois le concept dans un contexte plus élargi, l’élève pourra petit à petit faire des liens entre ses observations et structurer ses connaissances, ce qui fait la force de l’enseignement en spirale.
Cette activité donne aux mathématiques une image de science de l’exploration de ce qui nous entoure plutôt, qu’un recueil de concepts abstraits. La construction et l’observation de polyminos est reprise plus largement dans l’intérêt porté aux patterns. Selon le CREM[2] CREM , Centre de recherche sur l’enseignement des mathématiques, Nivelles., « on appelle patterns – mot anglais – toutes les symétries, les régularités, les rythmes, les formes diverses que l’on découvre dans les objets ou des événements, et qui invitent l’esprit à conjecturer des propriétés mathématiques, des lois ». Les élèves manifestent en général beaucoup d’enthousiasme face à de telles découvertes.
Pas de synthèse à la clé dans le cahier après l’activité, l’essentiel n’était pas là. Toute la richesse de l’apprentissage s’est passée lors des tâtonnements individuels face au défi posé et de la confrontation avec les autres. Cela aura permis aux enfants de prendre goût à la recherche et de garder confiance en leurs capacités. En définitive, nous parents ne pouvons pas imaginer ce que ces quelques coloriages sur une feuille quadrillée ont pu engendrer chez nos enfants.