Une fois encore les suites du décret « inscriptions » alimentent les rubriques enseignement des médias. Et quand un groupe CDH de la périphérie de Bruxelles prend la parole et a l’outrecuidance de mettre en cause la politique de « sa » ministre, tout le landerneau s’émeut : la télé entre en jeu, les portes du cabinet de la ministre s’ouvrent sans délais… et le calme revient !
Une fois de plus sur ce dossier, c’est la voix des privilégiés qui est abondamment relayée. La fixation quasi obsessionnelle des médias sur les inscriptions au début du secondaire (elles ont toujours posé des problèmes) cristallise toutes les attentions… et fait passer au second plan ou à la trappe tous les autres secteurs.
Tiens, à propos de ce décret, on passe curieusement sous silence d’autres effets néfastes. Il est vrai qu’ils touchent des élèves d’autres milieux. C’est le cas de l’effet « miroir aux alouettes » : certains parents de milieux populaires ont effectivement inscrit leurs enfants dans ces fameuses « bonnes écoles » si recherchées. Mais voilà, après un an, parfois après quelques mois, ils ont compris ou on leur a fait comprendre qu’il serait préférable… de retourner dans les écoles de leurs quartiers d’origine ! Cela va jusqu’à des exclusions de plus en plus nombreuses au terme du premier degré « commun ». Un triste gâchis !
Tout aussi curieusement, on donne très peu la parole aux métiers de la petite enfance, aux institutrices maternelles, aux puéricultrices,… qui travaillent dans des conditions déplorables : parfois plus de 25 petits bouts de 2,5 ans dans la même classe ! Elles jouent pourtant un rôle décisif dans l’accrochage des enfants et de leurs parents. Ici encore, plus le quartier est défavorisé, plus les conditions de travail et d’apprentissage sont mauvaises.
Vous avez entendu parler des réformes mises en œuvre dans l’enseignement qualifiant (le technique et le professionnel) ? La « CPU », vous connaissez ? Cette certification par « unités » ou mini-modules ? Quelques « experts » réagissent vigoureusement. Un large débat s’imposerait. Il s’agit en effet d’un secteur prioritaire : le technique et le professionnel… que certains veulent éviter à tout prix ! Malgré qu’il débouche sur l’emploi et que s’y développent pas mal d’expérimentations audacieuses. Dans le même temps on y déplore bien trop de décrochages, d’abandons sans qualifications et de retards. Est-ce « la » solution de certifier des mini-modules ? De plonger les étudiants dans des évaluations quasi permanentes ? De surcharger les enseignants qui ont été engagés dans l’expérience ? Et la quasi-suppression des sciences humaines pour les finalistes de ces sections, qu’est-ce que vous en dites ?
Enfin (parce qu’il ne faut pas être trop long), la réforme urgente de la formation des enseignants, quand sera-t-elle mise sur les rails ? Quand des mesures seront-elles prises pour concrétiser les principales orientations préconisées par les chercheurs ? En attendant, sur le terrain, dans les écoles, c’est la multiplication des « articles 20 » : cette horrible dénomination pour désigner ces personnes qui sont engagées faute d’enseignants qualifiés. La pénurie, quoi. Elle frappe particulièrement les écoles (des) pauvres. Toujours la même logique, hélas : là où il faudrait les gens les plus qualifiés et les plus expérimentés, on en est réduit à faire appel à des « bonnes volontés ».
On cherche en vain un projet fort, un cap, une boussole.