Cela bouge du côté de l’Éducation permanente. En six mois, le Conseil supérieur de l’éducation permanente (CSEP) a réuni deux fois les différentes associations du secteur.
En juin 2001, le sujet mobilisateur était « L’éducation permanente : entrons en débat ! » et, le 28 novembre, une suite était donnée sous forme de thématiques plus concrètes : critères et modalités de reconnaissance du secteur et modes de subventionnement.
Constatons un regain d’intérêt du politique de tous bords pour le secteur associatif en général. Il y a ensuite la volonté du ministre de tutelle Rudy Demotte de revoir le décret de 1976 instituant l’Éducation permanente en Communauté française. Il s’agirait de « doter le secteur d’un cadre qui lui assurera, tant sur le fond que sur la forme, de réelles perspectives d’avenir ». Enfin, les perspectives du refinancement de la Communauté française ne sont pas étrangères à ces nouvelles perspectives.
Secteur en danger
À moins d’être un initié dans ce secteur, l’Éducation permanente ne dit malheureusement pas grand-chose au grand public. Pourtant, il y a fort à parier que, de près ou de loin, vous soyez touchés, impliqués dans des 600 associations recevant des subsides à ce titre, dont nous pouvons citer les magasins du Monde Oxfam, ATD Quart Monde, la Ligue de l’enseignement… et bien entendu la CGE). Le décret de 1976 a voulu promouvoir ce secteur. L’objectif global est de favoriser la participation individuelle et collective des adultes par l’apprentissage d’une citoyenneté responsable, critique, solidaire, dans le respect des principes de la démocratie et de la déclaration des droits de l’homme. Cette « définition » vieille de 25 ans n’a rien perdu en force mobilisatrice dans une société où les inégalités croissent toujours. Historiquement, ce secteur s’appelait « éducation populaire » en raison de ses priorités. Le terme de permanent n’est-il pas trop vague ? Des questions essentielles se posent quant à l’organisation de ce secteur, mais il faut avant tout reconnaitre le véritable gisement qu’il constitue, à la fois créateur culturel et artistique et lieu de construction d’identités individuelles et collectives.
Tout ceci serait bien beau, mais les conditions dans lesquelles les associations de ce secteur tentent de mener à bien leurs projets est inacceptable. Ce décret est fort généreux dans ses intentions mais les budgets sont toujours restés pingres. Le secteur doit se contenter d’une enveloppe fermée (même en cas de refinancement) et toute nouvelle reconnaissance d’une association ne fait que diminuer la part du gâteau pour les autres. Chaque association est forcée de consacrer un temps trop précieux à des recherches de subsidiation tous azimuts. Cette logique contribue à créer des mécanismes de dépendances vis-à-vis des pouvoirs subsidiants : certaines organisations en sont arrivées à devoir dénaturer leur objet social pour survivre.
De plus, une bonne partie des subventions publiques provient des programmes de résorption du chômage qui dépendent des pouvoirs régionaux, ce qui affaiblit le pouvoir du ministre de tutelle. Triste sort pour un secteur potentiellement si riche…
En lien avec l’école
Les questionnements qui traversent actuellement l’Éducation permanente peuvent recouper les préoccupations des défenseurs de l’École publique. Les deux ont pour fonction commune de promouvoir la citoyenneté critique et la démocratie. Ces rôles sont partagés entre l’école qui prend davantage en charge l’apprentissage de la citoyenneté et les associations qui sont plus du côté de la participation et de l’engagement militant.
On constate que le système scolaire échoue dans son but premier qui est de transmettre un savoir en vue d’organiser l’égalité des chances pour tous. Ceci a pour effet d’accroitre le travail du secteur associatif, chargé alors de suppléer l’École. Nous plaidons donc pour la mise en place d’une politique en Communauté française favorisant les synergies entre secteurs de l’Éducation permanente et de l’École. La perspective du refinancement de la Communauté française offre cette occasion de sortir d’une logique de rivalité qui souvent oppose différents secteurs qui devraient être considérés comme complémentaires.
La CGE a plus d’une fois dénoncé le piège du Décret Missions qui enferme le monde enseignant sur lui-même en lui sommant de prendre en charge dans sa totalité l’instruction, la socialisation et l’éducation des jeunes. [1]Voir à ce sujet les articles de J. Cornet Enseigner : mission impossible, publiés dans le Ligueur en décembre 98 et janvier 99 et le livre de Pierre Waaub L’école, bonne à tout faire ?, … Continue reading Il y a actuellement une opportunité à rapprocher deux secteurs en recherche de sens identitaire, dans une optique de complémentarité mais aussi de continuité.
Illustrons ce propos avec une idée qui commence à faire son chemin au sein du monde éducatif, à savoir le regroupement par zone, par « bassin scolaire » de plusieurs établissements scolaires. Pourquoi ne pas pousser le raisonnement plus loin et ne pas « mutualiser » à l’échelle d’une zone géographique délimitée l’ensemble de l’offre éducative qui comprendrait les écoles, les mouvements de jeunesse, les mouvements associatifs pour jeunes et adultes, les centres culturels, les groupements sportifs,…? Pourquoi les centres de documentation et les complexes sportifs des écoles restent-ils fermés le weekend ou durant les vacances scolaires ? À l’heure où tous les élèves du fondamental disposent d’une adresse internet qui leur permet de contacter le bout du monde, on peut se poser la question d’une « politique éducative de proximité ».
Si l’idée d’un tel projet éducatif d’ensemble voyait le jour en Belgique francophone, nous serions preneurs du débat à condition de lever certaines contradictions en Communauté française. Cela impliquerait en premier lieu une autonomie plus large des différents acteurs mais également davantage de moyens que ceux dégagés par les récents Accords déjà mis en cause par le ralentissement de l’activité économique.
Notes de bas de page
↑1 | Voir à ce sujet les articles de J. Cornet Enseigner : mission impossible, publiés dans le Ligueur en décembre 98 et janvier 99 et le livre de Pierre Waaub L’école, bonne à tout faire ?, Éd. Labor, 2001. |
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