De solides chantiers attendent les décideurs politiques qui ont l’ambition de rencontrer les défis du changement climatique et du changement de l’école.
J’avais très envie de vous parler de deux questions qui me tiennent à cœur : d’une part, les résultats de la COP24 : un sous-investissement irresponsable, une absence d’ambition des responsables politiques qui m’atterre complètement… Et d’autre part : le lancement par le PS d’une vaste consultation sur l’école où il entend récolter les avis de tous ceux et celles qui s’intéressent à l’avenir de l’enseignement pour « alimenter son programme électoral 2019 »
Et, devant choisir, je me suis rendu compte que ces 2 questions avaient une chose en commun : dans les deux cas, le politique n’assume pas les responsabilités qui sont les siennes avec de très graves conséquences.
Qu’est-ce qu’il n’assume pas ?
Désormais, il sait le désastre annoncé mais il n’assume pas d’implémenter des mesures suffisamment radicales et bien pensées pour sauver la planète, les peuples ou plutôt pour arrêter de les suicider tout en veillant à plus de justice sociale car il y a un tel fossé social aujourd’hui qu’une transition brutale non accompagnée d’un rééquilibrage social ne sera pas viable pour une grosse partie de la population non plus.
Vous avez certainement été frappés comme moi par la jeune suédoise Greta Thunberg (15 ans) qui disait il y a peu à la face des responsables politiques du monde entier :
« Vous parlez de croissance économique verte et durable parce que vous avez trop peur d’être impopulaires ;
Vous poursuivez sur le même chemin au lieu de tirer le frein à main alors que vous savez qu’il nous mène dans l’impasse ;
Vous n’êtes pas assez matures pour dire les choses comme elles sont ;
Notre civilisation est sacrifiée pour permettre à une petite poignée de gens de continuer à gagner d’énormes sommes d’argent ;
Quand j’aurai 75 ans, mes enfants me demanderont pourquoi vous n’avez rien fait quand il en était encore temps ; vous dites que vous aimez vos enfants mais vous volez leur avenir sous leurs yeux !
Nous devons laisser les énergies fossiles dans le sol et nous concentrer sur l’équité… et si le système n’admet pas de solutions, nous devons changer de système ! »
Ça, c’est à l’échelle du monde et du climat.
Et à l’échelle de la Belgique, en matière d’enseignement, j’ai l’impression que la même pièce se rejoue à un autre niveau :
Alors que le PS a pleinement contribué avec le CdH depuis presque 4 ans à cet important chantier de réforme en profondeur de notre système scolaire consistant à :
– analyser les profondes failles de notre enseignement obligatoire qui, pour mémoire, est parmi les plus inégalitaires du monde, produit 25 % d’analphabètes fonctionnels au terme de la scolarité obligatoire, un énorme taux de redoublement et de l’ennui,
– et puis à imaginer et construire – en mettant autour de la table tous les grands acteurs de l’enseignement – les remèdes à y apporter, dans un plan ambitieux, comportant de multiples réformes articulées et phasées,
il a lancé il y a 5 jours une vaste consultation sur l’école par voie informatique où il entend récolter les avis de « tous ceux et celles qui s’intéressent à l’avenir de l’enseignement » et il annonce que les réponses qu’il recevra alimenteront son programme électoral pour 2019 !
Alors qu’il y a un énorme travail à faire encore pour expliquer et convaincre que les mesures qui vont être prises ne sont pas simples mais qu’il n’y a pas vraiment d’autre chemin, qu’il n’y a pas de voie royale, qu’il faut y aller, courageusement, et que c’est leur responsabilité d’expliquer, de convaincre, ils n’assument pas et d’une certaine façon, bottent en touche.
On le sait, il va falloir 15 ans de continuité pour que les mesures prévues dans le Pacte pour l’enseignement portent leurs fruits…
Ça ne veut pas dire qu’il ne va pas falloir rectifier le tir pendant 15 ans mais il va falloir garder le cap, les objectifs et analyser tout au long si les effets des réformes sont bien ceux attendus et, si pas, qu’est-ce qu’il faudrait changer.
15 ans… sinon on est repartis pour des réformes avortées.
Et le PS de demander aux citoyens : « comment les citoyens et les professionnels de l’enseignement pensent qu’on peut améliorer la qualité de notre enseignement et lutter contre l’échec scolaire et le redoublement » et « quels sont selon eux les principaux problèmes de l’enseignement en Fédération Wallonie-Bruxelles… ».
Envie de leur dire : retournez aux 220 pages de l’état des lieux de l’enseignement et aux 350 pages de l’avis numéro 3 !
Qu’ils soient inquiets parce que le train de réformes prévues dans le Pacte est encore diversement compris et apprécié, je le comprends, mais ce n’est pas en faisant semblant de repartir à la consultation qu’on va avancer et ce n’est pas prendre les citoyens et professionnels au sérieux que de procéder ainsi à mon avis !
Par contre, pour rencontrer les défis du changement climatique comme du changement de l’école, il ne fait aucun doute qu’ils (nos responsables politiques) vont devoir ouvrir de solides chantiers et se confronter positivement et respectueusement à nous, les citoyens, les professionnels et les entreprises) pour veiller à ce que chacun prenne dès à présent sa juste part (l’État, les citoyens et les professionnels) dans les mesures à mettre en œuvre.
Ça ne fait aucun doute mais c’est tout autre chose.
Et c’est aussi probablement la seule voie qui peut redonner du crédit au politique et à la démocratie.
Mis en ligne le 20/12/2018 à 12:52
Par Fred Mawet, secrétaire générale du mouvement socio-pédagogique ChanGements pour l’égalité