Dans notre établissement, nous travaillons par triplettes c’est-à-dire que pendant trois semaines, tous les cours de la matinée tournent autour d’un thème, d’une question. Ici, nous terminons un parcours sur la préhistoire. Les élèves ont eu des cours d’histoire, de géographie, de français autour de ce sujet.
Mon collègue du cours d’arts plastiques m’explique que son intention était de faire vivre aux élèves une expérience autour de cette période de l’histoire.
Il raconte. L’idée m’est venue un peu par hasard : j’ai pensé préhistoire, peintures rupestres, grotte. La seule pièce de l’école où il fait tout à fait noir sans besoin d’occulter les fenêtres, c’est le vestiaire des filles. J’avais deux périodes de cours d’affilée, c’est-à-dire nonante minutes.
Au début, j’ai travaillé en classe avec eux. Je leur ai montré des dessins d’hommes préhistoriques, dans des grottes. J’ai essayé d’expliquer le sens que cela pouvait avoir pour eux. On a parlé aussi de l’ambiance qu’il devait y avoir dans ces cavernes : dans le noir, sans beaucoup de bruit…
En classe, avec un groupe de première générale, dans des dessins individuels, j’ai fait manipuler les pastels, le fusain pour travailler à l’aplat.
Après une demi-heure de travail, nous nous sommes déplacés vers les vestiaires où, avant le cours, j’avais collé sur les murs des grandes feuilles de papier kraft. Je voulais créer un effet de surprise.
Je leur ai dit : « Maintenant vous allez vivre une expérience comme si vous étiez des hommes préhistoriques dans une grotte. »
Ils se sont répartis en groupes de trois et se sont munis d’un GSM par équipe.
J’ai distribué des fusains et dans cette semi-obscurité, ils se sont mis à dessiner les animaux ou les figures qu’ils avaient pu voir en classe juste avant.
Certains groupes ont démarré assez timidement en faisant des petits dessins, je les ai invités à investir toute la feuille, à occuper tout l’espace. Les panneaux n’étaient pas non plus immenses et le fusain est un matériau qui ne permet pas de faire des dessins précis, surtout qu’ils dessinaient avec l’aplat du fusain. Ils devaient agrandir leur geste. L’idée n’étant pas d’avoir un résultat parfait.
Je me suis placé à l’entrée de la pièce et j’ai distribué un fusain à chaque élève. J’ai demandé que le travail se déroule en silence et ils ont tous joué le jeu.
Le temps écoulé, ils ont quitté la pièce et ce n’est que le lendemain qu’on a pu revenir ensemble pour visiter l’ensemble des productions. J’ai fait entrer les élèves par équipes de deux, moi je patientais avec le reste du groupe dans le couloir pendant que le duo, à la lumière de leur GSM, découvrait les œuvres des autres.
À la lueur du téléphone et dans le silence, ces fresques très expressives racontaient des histoires ancestrales de mammouths, de cerfs, de chasseurs. Certains ont aussi représenté des paysages.
Je dirais que si c’était à refaire, je pourrais aller plus loin en construisant les supports. Ici, c’étaient des panneaux de kraft lisses, mais on aurait pu jouer sur la matière et les rendre plus irréguliers avec du papier mâché pour imiter la paroi d’une grotte.
C’est dommage aussi que je n’aie pas eu l’occasion de faire une grande visite avec le travail des autres classes, car j’ai reproduit cette séquence avec cinq groupes.
On reste dans l’éphémère, car on n’a pas de salle d’exposition ni de journée portes ouvertes, mais il leur reste le souvenir. Certains élèves qui sont maintenant en troisième me rappellent encore cette expérience qui les a marqués.