Innocenti 9 ?

Un nouveau pape ? Un nouveau bolide italien ? Une nouvelle « conquête » de Silvio B. ? Non, bien plus sérieux, c’est le nom de code d’un solide rapport de l’Unicef qui traite des « Enfants laissés pour compte » dans 24 pays riches. Cette étude tente de mesurer les inégalités et d’évaluer les écarts entre enfants pour ce qui relève du bien-être matériel, de la santé et de l’éducation. Elle débouche, c’est la mode, sur un classement des pays concernés.

L’intérêt incontestable de ce document, c’est qu’il s’attache prioritairement à la situation « des enfants qui risquent d’être mis à l’écart, c’est-à-dire ni intégrés, ni protégés ». Le sous-titre du rapport est limpide : « classement des inégalités de bien-être entre les enfants des pays riches ».

Puisque classement il y a, où se situe la Belgique ? En matière de santé, nous sommes 6ème sur 24. Pour le bien-être matériel, 15ème. Mais, en matière d’enseignement, on s’en doute, c’est la cata. : 24ème sur 24 ! « C’est en Belgique, en France et en Autriche que les inégalités sont les plus profondes ».

Donc, rien de très nouveau ? Simple confirmation des enquêtes Pisa ? Oui, dans les chiffres. Mais ce qui frappe, c’est la tonalité des commentaires qui ne tournent pas autour du pot : « certains pays riches laissent le fossé se creuser ». Ou encore : « ces écarts ne sont pas inévitables, mais ils sont injustes et inacceptables ». Plus précis : « les inégalités observées ne résultent pas de différences dans la répartition des aptitudes naturelles, mais bien de l’application de politiques qui ont permis au fil du temps de réduire l’écart vis-à-vis d’élèves défavorisés ».

D’où l’appel discret aux pays « du fond de la classe » : « le fait que certains pays s’en sortent mieux que d’autres révèle clairement que l’on peut briser ces inégalités ». Evidemment pas en consacrant à cet objectif moins de 1% du budget enseignement de la Communauté française ! Pour rappel : on va arriver péniblement à 65 millions d’euros (avec le rabiot de Robin des bois) pour « l’encadrement différencié » sur un budget total de près de 7 milliards. Encore moins en s’accrochant à des tabous du passé ou corporatistes.

Coïncidence : je termine la lecture d’Innocenti 9 et j’ouvre Le Soir de ce samedi 4 décembre où je découvre un titre à la une : « l’école francophone en progrès ». Nuance en page 5 : « le fameux test Pisa lui serait favorable » et surtout –cocorico- « recul au Nord ». Et voilà, le tour est joué : ce qui compte (pour le journal et ses lecteurs), c’est ce rapport Nord/Sud (à notre petite échelle belge, s’entend).

Alors que l’essentiel, comme le rappelle Innocenti, est de savoir si l’écart entre les « forts » et les fragiles diminue dans chaque communauté et si les politiques mises en œuvre permettent d’améliorer les résultats des enfants des familles plongées dans la précarité. Donc de combattre les inégalités inacceptables au Nord comme au Sud de la planète.

Avec quelles lunettes lirez-vous les résultats de la nouvelle vague de Pisa ?